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Qu'est-ce que ... le chant grégorien ?

Le pape Grégoire I dictant les chants grégoriens, une colombe sur son épaule représentant l'inspiration divine

À Noël de l'an 800, Charlemagne est couronné empereur à Aix-la-Chapelle, près de Cologne. L'ambitieux monarque souhaite restaurer l'empire romain, et un des outils dont il dispose pour cela est le chant grégorien.

Mais au fait, qu'est-ce que le chant grégorien ? Ce nom vient de Grégoire le Grand, pape de 590 à 604. Les légendes disent que, frappé d'inspiration divine (cf image), il composa cet immense corpus de textes religieux, destinés à être diffusés à travers l'Europe pour unifier la foi chrétienne.
Bien sûr, la réalité est toute autre. Les auteurs anonymes de ces chants sont très nombreux. Les mélodies d'origines étaient issues de chants régionaux traditionnels collectés à travers les territoires de l'ex-empire romain. Elles furent réécrites, probablement par des moines, afin de correspondre à un style unifié, puis diffusées dans toute l'Europe chrétienne.
Les sources du chant grégorien sont donc très variées. Il incorpore des éléments des chants vieux-romain, ambrosien, bénéventain, mozarabe et gallican (pour ne citer que les principaux), qui constituaient les traditions liturgiques des différentes régions de l'empire.

Quant aux caractéristiques techniques qui lui donnent son unité, elles subissent des influences encore différentes.
Le chant grégorien, à l'origine, est monodique (tout le chœur chante la même chose), sur un rythme libre, avec certains passages psalmodiés. Quoique ces éléments soient assez répandus à l'époque, la manière dont ils sont utilisés dans le chant grégorien est très fortement inspirée par la liturgie juive contemporaine.
Le chant grégorien est également modal. C'est de là que vient l'aspect du chant grégorien qui vous semble peut-être le plus étrange. Dans la musique à laquelle vous êtes habitués, il n'y a que deux modes : le mode majeur et le mode mineur. Les intervalles qui séparent les notes de la gamme utilisée ne sont pas les mêmes, et cela donne une différente « couleur » aux morceaux selon qu'ils sont dans un mode ou dans l'autre.
Dans le chant grégorien, au lieu qu'il n'y ait que ces deux façons d'agencer les notes, il y en a huit différentes. C'est pour cela que vous avez parfois l'impression qu'il y a des fausses notes, qu'il manque un dièse ou un bémol : c'est normal, mais dans un mode auquel vous n'êtes pas habitués.
Les huit modes du chant grégorien sont quant à eux empruntés à la musique byzantine.

Revenons-en à Charlemagne. Afin d'unifier son territoire et de plaire à l’Église, il met son conseiller Alcuin de York en charge de l'éducation (à cette époque l’apanage de l’Église), et lui demande de faire de la musique une priorité. C'est ainsi que le chant grégorien se voit diffusé à travers tout l'empire carolingien.
Les pratiques chantées des différentes régions de l’empire disparaissent alors au profit d'un style liturgique unique inspiré par des traditions d'origines très diverses. Le chant grégorien lui-même subira de nombreuses transformations, si bien qu'il s’avère difficile de dire quand s'arrête l'ère du chant grégorien et quand il est remplacé par un autre style. La pratique du chant grégorien dans un but strictement religieux perdure d'ailleurs jusqu'à aujourd'hui. Mentionnons les travaux de restauration menés au XIXe siècle notamment par Dom Guéranger et les moines de l'abbaye de Solesmes qui ont permis un vaste approfondissement de nos connaissances.

Lucas Chaumard

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