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Goyescas de Granados à l’Opéra de Limoges – Clignotement d’une présence – Compte-rendu
Dans ces conditions, le choix d’une version de concert s’avère tout à fait compréhensible, néanmoins agrémentée par l’intervention de Clarac Deloeuil > Le Lab, l’équipe ayant eu l’idée de faire appel aux vidéos de Julien Roques. Un tulle sépare donc l’orchestre du chœur, mais au lieu d’y projeter de simples reproductions des Caprichos de Goya qui ont inspiré le compositeur, c’est une interprétation actuelle de ces gravures qui est proposée. Des scènes imaginées par Goya – Les Vendeuses de porcelaine, les Majas au balcon, etc. – ne restent ici que les contours dessinés par des néons colorés, avec notamment le principe de clignotement qui permet de faire alterner deux états d’une même image : on voit le pantin sauter pour El pelele, on voit aussi, avec une ironie un peu décalée par rapport au sérieux de la scène, se juxtaposer la Maja desnuda à la Maja vestida.
Vanessa Goikoetxea (Rosario), Kevin Amiel ( Fernando) & Robert Tuohy @ Opéra de Limoges
Sous la baguette de son directeur musical Robert Tuohy, l’Orchestre de l’Opéra de Limoges livre une fort belle prestation, qui met en relief les qualités d’orchestrateur de Granados, que l’on connaît évidemment beaucoup mieux comme pianiste compositeur. Très sollicité pendant les deux premiers des trois tableaux que compte la partition, et confronté à une écriture touffue, le chœur (préparé par Elisabeth Brusselle) relève le défi haut la main et contribue pour une bonne part au succès de la soirée.
Des quatre solistes, Pepa est peut-être celle qui a le moins à chanter, et le beau timbre d’Héloïse Mas nous le fait encore plus regretter. Armando Noguera est un fier Paquiro, même s’il semble moins sonore dans le bas de la tessiture. Hoffmann à Dijon, Alfredo à Toulouse et Bordeaux, Kévin Amiel ne craint pas de se frotter au grand répertoire : curieusement, le ténor français, auquel on a parfois pu reprocher un excès d’assurance, reste ici sur son quant-à-soi. Quant au personnage principal, il trouve à Limoges une titulaire à l’exacte mesure du rôle : si l’on se tourne vers les derniers enregistrements, on constate que Rosario est confiée tant à des mezzos, tantôt à des sopranos relativement légers, la vérité se situant en fait à mi-chemin, un soprano plus large étant l’idéal. Ayant à son répertoire Donna Anna, Alice Ford ou Hanna Glawari, auxquelles s’ajoutera prochainement Vitellia à Bilbao, Vanessa Goikoetxea (photo) confère à l’héroïne toute sa noblesse et sait traduire l’émotion du dernier tableau : capable de pianissimi dans « La Maja y el ruiseñor », elle maîtrise également le dramatisme de « El amor y la muerte ».
Laurent Bury
Photo © Opéra de Limoges
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