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« Wagnermania » par Case Scaglione et l’Orchestre national d’Île-de-France – Le courant passe ! – Compte-rendu

Vacances ou pas, le public de l’Orchestre national d’Île-de-France se montre d’une exceptionnelle fidélité. Celles de la Toussaint commencent et pourtant la Grande Salle de la Philharmonie fait le plein pour la « Wagnermania » qui inaugure la saison de l’Ondif, la première avec Case Scaglione (photo), son nouveau directeur musical. L’ère Mazzola s’est refermée et l’on ne redira jamais assez combien, depuis 2012, le chef italien a su regonfler le moral et faire progresser l’orchestre francilien. Précieuse dynamique qu’il s’agissait de ne surtout pas briser ... Depuis le concert de Scaglione (avec le splendide Nathan Meltzer au violon) en novembre en 2018 (1), on voyait arriver avec confiance le moment du passage de relai. La rentrée de l’Ondif le démontre : le mandat du maestro américain s’ouvre sous les meilleurs auspices.
 

Case Scaglione © Christophe Urbain

Vrai moment de bonheur qu’un programme pour lequel on a fait appel à deux wagnériens aguerris : Michelle De Young et Simon O’Neill. D’entrée de jeu, nous voilà dans la Scène 3 de l’Acte II (« Dies alles ») de Parsifal ! Plongée un peu brutale sans nul doute dans un fragment d’une œuvre où tout fait sens par la continuité. L’entrée dans cette première partie de concert n’est pas ce qu’il y a de plus immédiat, pour le public comme pour les chanteurs (on a connu des « Ich sah das Kind » plus envoûtants et plus troublants ...), mais on se laisse peu à peu prendre par la qualité de l’échange entre le jeune chef et ses troupes ; par le soin qu’il apporte aux détails, à l’équilibre entre les pupitres, parvenant à un résultat remarquable de vie intérieure, qui porte le dialogue entre la Kundry de Michelle DeYoung et le Parsifal puissant de Simon O’Neill.

Prélude et Mort d’Isolde (version orchestrale) ouvre la seconde partie et montre des cordes splendides de cohésion sous une battue souple et suggestive. On a suivi la soirée près de la scène côté jardin et d'autant mieux pu juger de la remarquable complicité que Scaglione entretient avec ses musiciens, sachant obtenir avec une autorité naturelle un résultat conforme à ses souhaits. Le courant passe et le fameux diptyque se déploie avec un lyrisme et une intensité admirables.
Une Scène 3 à nouveau, celle de l’Acte I de la Walkyrie (« Ein Schwert » ), conclut. En Siegmund et Sieglinde, O’Neill et De Young, se placent d'emblée au cœur de l’action et leur engagement vocal et dramatique de chaque instant peut s’appuyer sur une baguette ardente, engagée, merveilleusement poète aussi.
Pour la prochaine série de l’Ondif avec Scaglione, il faudra patientier jusqu'à la mi-janvier (un programme Ives-Beethoven avec le pianiste Federico Colli) mais, d’ici là, la présence de divers chefs invités à de quoi retenir l’attention : Tito Muñoz (pour le Sacre du Printemps), Ruth Reinhardt (en compagnie de l’archet stylé de Diana Tishchenko, 1er Prix du Concours Long-Thibaud 2018) et Joshua Weilerstein.

Alain Cochard

Paris, Philharmonie, 22 octobre 2019

(1)www.concertclassic.com/article/nathan-melzer-case-scaglione-et-lorchestre-national-dile-de-france-la-philharmonie-de-paris
Saison 2019/2010 de l’Orchestre national d’Île-de-France
www.orchestre-ile.com/

Photo © Christophe Urbain

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