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Samson de Haendel dirigé par Leonardo García Alarcón au Festival de Beaune 2018 - Fougue réglée - Compte-rendu

Le Festival de Beaune s’est fait une spécialité de Haendel, fort de 42 oratorios ou opéras de notre compositeur depuis ses 35 ans d’existence. Avec un goût prononcé pour les œuvres rares. Ainsi de Samson, oratorio méconnu s’il en est, présenté en ouverture de cette édition 2018. À cela s’ajoute une nouveauté : l’apparition de Leonardo García Alarcón (photo), chef d’orchestre baroqueux universellement célébré, accueilli comme tel pour la première fois à Beaune (bien qu’il y soit venu il y a longtemps comme claveciniste et organiste sous la direction de Gabriel Garrido). L’attrait était donc double, si l’on peut dire, d’autant que ce concert n’est donné que deux seules fois : à Namur peu avant, puis dans la Basilique Notre-Dame de la capitale des vins de Bourgogne.

Matthew Newlin (Samson) © matthewnewlin.com
 
Car García Alarcón vient avec ses forces musicales de Namur au complet : le Chœur de chambre, dont les vertus ne sont plus à chanter, et aussi le Millenium Orchestra, qu’il a fondé il y a cinq ans, deux formations dont il est directeur musical (en sus de sa Cappella Mediterranea). À ces interprètes renommés, s’adjoint une distribution vocale éminemment choisie. Matthew Newlin campe un Samson puissamment douloureux de sa voix ferme et d’une caractérisation fortement expressive, héros biblique promis après ses exploits à une fin fatale selon cet oratorio de 1743 (le contraire d’une certaine manière du livret du Samson et Dalila de Saint-Saëns). Klara Ek, Dalila tout aussi souffrante (puisqu’ici irrémédiablement rejetée), est portée par un chant à l’éclat ductile. De sa voix de contre-ténor distillée avec une caractérisation affirmée et la technique sûre qu’on lui connaît, Lawrence Zazzo complète avec Micah, le confident ami de Samson, le trio des rôles principaux distribués ici à des chanteurs anglophones (pour ce livret en anglais, à l’instar des oratorios de Haendel et au rebours de ses opéras en italien). À Luigi De Donato revient la double et opposée incarnation de Manoah, le père attristé, et de Harapha, le fourbe philistin, à travers une sombre projection de circonstance. Pour des rôles épisodiques, Julie Roset dispense un joli legato, sensible notamment dans son dialogue avec le petit « Chœur des Vierges » réparti judicieusement dans l’espace. Maxime Melnik (1) se révèle pareillement efficace dans d’autres rôles annexes.
 
Le Chœur de chambre de Namur réagit en phase et en situation, entre ses interventions glorieuses ou éplorées (comme le chœur funèbre des Israélites à la toute fin, sommet d’une partition foisonnante qui alterne veine lyrique et dramatique). Le Millenium Orchestra n’est pas en reste de verve expressive, sous la battue fougueuse d’un García Alarcón à l’énergie décidément inépuisable.
 
Pierre-René Serna

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(1) Jeune ténor belge, très remarqué lors de la finale du dernier Concours Voix Nouvelles
 
Haendel : Samson – Beaune, Basilique Notre-Dame, 6 juillet 2017.

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