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Paris - Compte-rendu - Pleyel : Heureux Gewandhaus, triste Lang Lang


La venue à Paris du Gewandhaus de Leipzig est toujours un événement. Orchestre de tradition créé en 1743 que Mendelssohn dirigea pendant de nombreuses années, il a gardé sa patine en dépit des bouleversements politiques. Son actuel chef titulaire depuis septembre 2005, l’Italien Riccardo Chailly, considéré à juste titre comme un spécialiste du répertoire germanique, proposait en deux concerts un voyage autour de Beethoven, Bruckner, et bien sûr Mendelssohn pour le bicentenaire de sa naissance.

Le premier soir, la Symphonie n°2 de Beethoven, bien qu’impeccable de tenue, paraissait très traditionnelle après l’écoute, la veille, de Gardiner et du LSO(voir compte-rendu ci-contre). En revanche, dans la Symphonie n°3 « Wagner » de Bruckner (édition de 1878), Chailly galvanise ses troupes avec un sens de l’équilibre, de la splendeur sonore, édifiant de manière architecturale la construction de cette cathédrale qui, sous d’autres baguettes, peut paraître éclatée. Lyrisme à fleur de peau, cohésion des pupitres caractérisent cette interprétation d’une réelle grandeur où ne manque, dans la péroraison finale, que le souffle d’un Celibidache.


Le lendemain, dans une Salle Pleyel comble, la venue du médiatique pianiste Lang Lang suscite sans doute davantage d’intérêt. Pourtant, ses doigts de fée, imparables, ses mimiques insupportables, sa façon inimitable de se mettre en avant n’ont rien à faire avec la musique. Il n’est que d’écouter l’enregistrement de Rudolf Serkin dans le même Concerto pour piano n°1 en sol mineur opus 25 de Mendelssohn, ou d’avoir entendu récemment Alexandre Paley dans la même œuvre, pour se rendre compte de la différence qui sépare des stylistes d’un pianiste aux moyens exceptionnels, certes, mais qui ne sait pas s’en servir. Le bis (L’Etude n°3 opus 10 « Tristesse » de Chopin) est de la même eau : sonorité cristalline, piano en apesanteur puis précipitation sans raison avant de retomber dans l’extase.


Heureusement, cet hommage à Mendelssohn commencé par l’Ouverture « avec trompette » opus 101 rappelant celle de La Grotte de Fingal, et terminé par la Symphonie n°3 en la mineur opus 56 « Ecossaise » permet à l’orchestre et à son chef de briller, distillant des jeux de lumière, une virtuosité, une suavité, qui sont aussi l’apanage de l’Andante de la Symphonie n°5 « Réformation » donné en bis. L’incontournable Marche nuptiale y gagne également en subtilité, attestant la cohérence exceptionnelle des cuivres du Gewandhaus.



Michel Le Naour




Paris, Salle Pleyel, 11 et 12 février 2009


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Photo : DR

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