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Messes de Martini et de Berlioz sous la direction d’Hervé Niquet au Festival Berlioz - Riche confrontation - Compte-rendu

On doit à l’inlassable tête chercheuse qu’est Hervé Niquet (photo), ici sous le patronage du Palazzetto Bru Zane (et la participation de l’entreprenant Alexandre Dratwicki), la première partie de ce programme de concert, avec une Messe des morts de Martini inédite pour notre temps. Jean-Paul-Égide Martini (1741-1816) fut un compositeur ayant fait carrière à Paris, bien que né en Allemagne, avec un certain renom en son époque, auteur des quelques opéras et de romances, dont le célèbre Plaisir d’amour. Sa Messe des morts date de la toute fin de sa vie, en 1815, année de sa création avant une reprise l’année suivante et avant de tomber dans l’oubli. C’est donc une résurrection que nous offre ce concert, d’une partition oubliée et d’un compositeur qui l’est autant. L’entreprise valait assurément d’être tentée, si l’on en juge par la découverte d’une musique prenante, à l’occasion pourvue de surprenants effets saisissants. Le Concert Spirituel, orchestre et chœur, s’en fait le vibrant porte-parole sous la direction nerveuse et investie d’Hervé Niquet.
 
La seconde partie de soirée se réserve à la Messe solennelle de Berlioz. Une œuvre contemporaine à dix ans près, en 1824. On sait que le compositeur l’avait ensuite reniée, pour la détruire, sauf un exemplaire offert au violoniste Antoine Bessems et retrouvé en 1992. Cette confrontation permet ainsi de tracer des parentés entre la Messe de Martini et celle de Berlioz, l’une de la dernière maturité et l’autre de toute jeunesse, en particulier dans une manière lyrique et dramatique dans les deux cas. Au reste, alors que l’on ne sait si Berlioz avait connaissance de cette œuvre précise de Martini, il connaissait le compositeur et certaines de ses partitions, et devait ainsi s’attaquer à une orchestration de Plaisir d’amour.

© Bruno Moussier
 
Les mêmes interprètes, adjoints de solistes vocaux, s’acquittent de leur seconde tâche avec une égale ferveur. Diana Axentii et Sébastien Droy délivrent un chant bien projeté, alors que le baryton-basse Mikhail Timoshenko dispose d’une émission plus limitée. Peut-être l’ensemble, orchestre et chant, manque-t-il de l’ampleur souhaitée (que savait dégager Jérémie Rhorer dans cette même œuvre en janvier dernier (1), avec des cordes chétives et de grêles forces chorales ; en raison certainement d’effectifs par trop restreints ainsi que de l’acoustique sèche de l’auditorium provisoire implanté dans la cour du château de La Côte-Saint-André. À noter que ce programme sera repris en juin prochain à Versailles, puis au Festival de Montpellier. Et à la suite est prévu un double enregistrement, pour chacune des œuvres (complété pour la Messe de Martini des motets ajoutés par le compositeur, ici absents du concert). Pour qui serait tenté par la découverte…
 
Pierre-René Serna

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(1) Lire notre compte-rendu :
www.concertclassic.com/article/berlioz-et-beethoven-sous-la-direction-de-jeremie-rhorer-au-theatre-des-champs-elysees

Festival Berlioz,  La Côte-Saint-André, Auditorium provisoire du château, 28 août 2018
 
© Bruno Moussier

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