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​Le Quatuor Joyce à la salle Cortot (Streaming) – Souffle partagé – Compte-rendu

Léo Marillier, Apolline Kirklar, Loïc Abdelfettah et Emmanuel Acurero sont tous les quatre passés par le CNSMDP (pour le DAI contemporain) et ont renforcé leurs liens musicaux au cours du premier confinement pour donner naissance au Quatuor Joyce. Leur premier concert officiel, à la Chapelle expiatoire en septembre dernier, nous avait enthousiasmé avec un programme (Beethoven-Schoenberg) exigeant et formidablement maîtrisé (1). On n'éprouve pas moins d'admiration face celui qu’ils ont enregistré le 11 février à Cortot (à l’initiative de Nouveaux Virtuoses et d’Inventio) et que l’on pourra découvrir en streaming le 23 février. Grand bonheur pour les quelques personnes présentes dans la salle de la rue Cardinet qu'une heure de musique durant laquelle s'enchaînaient le Quatuor « 1905 » de Webern, le 1er Quatuor « Sonate à Kreutzer » de Janáček et le 1er Quatuor de Brahms, autant dire un programme aussi original que dense.
 

© Franck Jaillard - Studio Orta, Lucy et Jorge Orta
 
De 1905, comme son titre l’indique, le Quatuor de Webern ne fut créé qu’en mai 1962 par le Washington String Quartet dans la capitale fédérale. On regrette que cette partition ne soit pas plus souvent présente dans les programmes, surtout en la découvrant dans une interprétation du niveau de celle des Joyce. Ce n’est plus un accord mais, par l’impalpabilité, l’immatérialité de la sonorité, un souffle partagé ... Magique, la conclusion de l’ouvrage sous les quatre archets en dit long sur le degré d'entente et d’homogénéité auquel ils parviennent. Tout au long de la pièce, on aura été séduit par la richesse des couleurs et l’organicité d’un discours qui rend compte de la singularité d’une composition de jeunesse entre deux époques – deux siècles.
 
L'engagement s'avère tout aussi profond dans le Quatuor «Sonate à Kreutzer » de Janáček, composition tardive mais dont – la passion pour Kamila aidant – l’énergie, la liberté, l’âpreté ne laissent de surprendre. Les jeunes archets restituent parfaitement la dimension « opéra sans paroles » de la partition (selon la si juste formule de Bernard Fournier) ; en saisissent tous les ressorts psychologiques avec une intensité et un relief magnifiques.
Ceux-ci ne font pas défaut non plus à l’Allegro initial de l’Opus. 51 n° 1 de Brahms, pour traduire l’ampleur avec laquelle s’ouvre un Quatuor en ut mineur dont les interprètes, d’emblée en pleine possession de leur sujet, traduisent l’esprit avec une rare plénitude. Quel lyrisme tout à la foi vibrant et étreignant, pudique et décanté montrent-ils dans la Romanze, quel secret agitato de l’âme font-ils entendre dans l’Allegretto, avant un final où la science des sons et le cœur forment la plus harmonieuse alliance. Quel talent : suivez les Joyce de près !
 
Alain Cochard

 (1) https://www.concertclassic.com/article/le-quatuor-joyce-joue-schonberg-et-beethoven-tutoyer-les-chefs-doeuvre-compte-rendu
 
 
Concert capté le 11 février à la salle Cortot et diffusé en streaming (payant, 8 €) le 23 février 2021 à 19h sur : https://www.billetweb.fr/cortot-fevrier?utm_medium=display&utm_source=bachtrack.com&utm_campaign=listinglink#eventcortot-fevrier
 

Photo © Concertclassic

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