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La Région Nouvelle-Aquitaine interpelle le Gouvernement au sujet des festivals d'été – De l’urgence d'une clarification

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La Région Nouvelle-Aquitaine interpelle le Gouvernement au sujet des festivals d'été – De l’urgence d'une clarification

L’incertitude qui pèse sur déroulement des festivals de la seconde moitié de juillet et du mois d’août pose de graves problèmes d’anticipation aux organisteurs et exige des réponses. C’est en ce sens qu’Alain Rousset, président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine et Eric Correia, conseiller régional en charge de l’économie créative, ont adressé le courrier ci-dessous (daté du 22 avril) à Edouard Philippe et Franck Riester, insistant sur l'urgence d'une "clarification, rapide et tranchée"
Des propos qui reflètent l’état d’esprit de l’ensemble des festivals français qui maintiennent pour l’heure leur édition 2020.  

« Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre de la culture,
 
Nous sollicitons toute votre attention sur la question cruciale des festivals et manifestations culturelles qui, pour l'heure, sont appelés à se tenir de mi-juillet à août 2020.
 
Au regard de la situation sanitaire et des épreuves que traverse notre nation, toutes les manifestations de ce type ont été annulées jusqu'à la mi-juillet, annonce faite par le président de la République. Nous pensons que cette décision s'imposait et du Hellfest aux Eurockéennes en passant par le festival d'Avignon, il semblait proprement impensable de maintenir de tels évènements, même si priver nos concitoyens d'une telle richesse et d'une telle diversité culturelle est un crève-cœur dont nous savons qu'il vous affecte également.
 
Toutefois, à ce jour, beaucoup de festivals ne sont pas encore annulés sur la seconde quinzaine de juillet ou sur le mois d'août. En effet, nombreuses encore sont les manifestations appelées à se dérouler sur cette période, comme par exemple en Nouvelle-Aquitaine, les festivals 1001 Notes en Limousin du 25 juillet au 8 août, Musicalarue à Luxey du 31 juillet au 2 août, le Reggae Sun Ska du 7 au 9 août, ou bien encore le festival du film francophone à Angoulême du 25 au 30 août...
 
Au total, plusieurs dizaines d'évènements, de petite et grande taille, seront organisés autour de toutes les disciplines et esthétiques artistiques, ceci pour notre seule région.
 
Les organisateurs doivent impérativement anticiper la tenue de leurs manifestations. Le montage de certains de ces festivals prend plusieurs semaines et se fait donc très en amont. L'incertitude et le doute pour ces personnes et leurs équipes est double : y aura-t-il finalement une prolongation de l'interdiction entrainant donc une annulation dont l'annonce pourrait être, pour elles, trop tardive et engager ainsi des frais supplémentaires ?
Par ailleurs, quels sont les critères objectifs pouvant déterminer si tel ou tel festival peut raisonnablement se maintenir alors même que la responsabilité sanitaire leur incombe et sous quelles conditions pour une prise en charge des festivaliers ?
 
S'ajoute à cela, vous le savez, la très grande probabilité que peu, voire quasiment pas, de public ne se déplace pour l'occasion (risque sanitaire et promiscuité alors même que le risque viral ne sera certainement pas encore éradiqué sur le territoire national).
 
Vous le comprenez dès lors aisément, monsieur le Premier ministre, la tenue de ces manifestations durant cette période est un non-sens.
 
Le risque économique est très grand pour elles, et le risque humain plus préoccupant encore ; cela impose une clarification, rapide et tranchée. Les structures organisatrices sont majoritairement des associations et des TPE indépendantes, qui font vivre la diversité musicale, mais elles restent globalement fragiles.
 
Si l'État est à l'origine de la décision d'interdiction des festivals sur l'ensemble de la période estivale, comme vient de l'annoncer le gouvernement belge, le cas de force majeure peut être invoqué, réduisant ainsi les risques pour l'organisateur, tout en lui permettant de jouer la solidarité avec les artistes/auteurs.
 
Les festivals concernés, bien qu'ayant d'ores et déjà engagé des frais, limiteraient ainsi leurs pertes financières et nous aurions la certitude de les retrouver l'an prochain.
 
A contrario, si les organisateurs devaient être livrés à eux-mêmes sans consigne nationale, et que la tenue de leurs manifestations relevait de leur seule décision, avec un fort risque d'annulations, des déprogrammations d'artistes étrangers, et de fortes interrogations sur les dédommagements des assurances, alors nous pourrions perdre beaucoup de ces remarquables temps de vie, d'échange, de partage, et de rencontre interculturelle, qui ne se remettraient pas d'une telle expérience. Et cela serait une catastrophe économique de plus pour ces structures et nos territoires.
 
Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre de la Culture, parce qu'il relève de votre responsabilité de décideurs politique de prendre les initiatives qui s'imposent et de secourir les organisateurs de festivals plongés dans l'incertitude d'une épidémie qui défie toute prédiction, nous vous demandons de bien vouloir annoncer l'interdiction et l'annulation de toute manifestation de ce type pour tout le courant de l'été 2020.
 
Ceci afin de préserver la santé de nos compatriotes tout autant que d'épargner un risque économique majeur pouvant peser sur nos entreprises culturelles et associatives locales. Il en va de la créativité de nos territoires et de leur capacité à produire encore des spectacles de qualité dans les années qui viennent, car ces entreprises ont besoin de visibilité pour engager une relance, l'incertitude et la confusion actuelle ne permet pas d'envisager l'avenir sereinement.
 
Si nous n'y prenons garde et si nous ne les préservons pas dès à présent, c'est toute la programmation culturelle des années à venir qui pourrait être obérée pour nombre de structures incapables de supporter économiquement une annulation non indemnisée ou mal préparée.
 
Nous savons pouvoir compter sur votre compréhension et votre sens des réalités en la matière et, bien que ceci relève d'un choix désespérant à l'heure où la promotion de la culture sous toutes ses formes doit rester un credo permanent, nous espérons que vous prendrez la bonne décision, la seule qui, hélas, s'impose en cette période exceptionnelle à tous égards.
 
Vous remerciant par avance de l'accueil favorable de notre proposition, nous vous prions d'agréer, Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre de la Culture, l'assurance de notre haute considération. »

NB  Les passages en gras figurent dans le communiqué de presse

Photo (L'Abbaye aux Dames de Saintes) © saintes.fr

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