Freni et plus encore Cotrubas ou Scotto, Mimi d'exception, étaient de grandes Violetta, tout comme Patrizia Ciofi, titulaire majeure de la célèbre phtisique, qui vient assez naturellement d'ajouter à son répertoire la cousette puccinienne. Moins virtuose que la Traviata, Mimi n'en est pourtant pas moins l'une des ses plus proches héritières, la simplicité de ce personnage sensible, traversé par la passion avant d'être emporté par la maladie, n'étant en effet qu'apparente, tant son interprétation repose sur sa psychologie et l'évolution de son état. Pour la soprano italienne qui sait ce qu'incarner veut dire, Mimi est une aubaine et arrive à point nommé dans un parcours sans faute.

Caractérisée avec finesse, d'une voix ferme au timbre mordoré où s'est déposé la patine belcantiste de Lucia, Sonnambula ou Stuarda, son héroïne allie tout d'abord le charme et la séduction, avant de gagner progressivement en intensité et en émotion au 3ème acte, avec un frémissant « Donde lieta usci » où se lisent les affres de l'inquiétude. Au 4ème enfin, sur le point de rendre l'âme, apaisée comme Violetta au milieu des siens, Ciofi se fait déchirante, trouvant des accents d'une saisissante vérité dramatique, émis sur un fil de voix, si fragile qu'on le croirait déjà rompu. Ce premier portrait très personnel ne devrait certainement pas être le dernier...
 
Rodolfo engagé, au timbre clair et ensoleillé, Stefan Pop complète dignement la distribution qui associe Mario Caria (fougueux Marcello), Christian Helmer (solide Schaunard) et Nicolas Cavallier (paternel Colline) à la délicieuse Julie Fuchs (Musetta). Royal Philharmonic Orchestra correctement dirigé par Jean-Luc Tingaud pour cette version de concert produite par l’association ColineOpéra (1) et à laquelle l’Ensemble vocal Métaboles et la Maîtrise des Hauts-de-Seine ont également prêté leur concours.
 
François Lesueur

(1) www.colineopera.org
 
Puccini : La Bohème (version de concert) – Paris, Salle Pleyel, 17 juin 2014