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Der Schauspieldirektor de Mozart et Prima la musica e poi le parole de Salieri par la Compagnie lyrique Opera Fuoco - Pétillante confrontation – Compte-rendu

L’idée est judicieuse de retrouver la séance de confrontation de deux ouvrages lyriques en un acte, en leur temps concurrents : Der Schauspieldirektor de Mozart et Prima la musica e poi le parole de Salieri. L’initiative revient à Opera Fuoco, qui a repris la soirée historique succédant à la commande de ces deux pièces, en 1786 par Joseph II d’Autriche à Vienne. À Salieri incombera le succès, et moins à Mozart. Ce qui semble toujours d’actualité ; si l’on en juge par le vote proposé au public, au sortir de ce spectacle à la salle Ravel de Levallois, où Salieri l’emporte sur Mozart.

David Stern © Amit Israeli
 
Il est vrai que, dans une égale légèreté, la seconde pièce se fait plus enlevée, sur une joyeuse trame similaire contant des rivalités innocentes et divertissantes au cours de la gestation d’un opéra. La postérité semble cependant en avoir jugé autrement, si l’on se fie aux versions discographiques : une petite dizaine pour le Mozart et seulement deux, anciennes, pour le Salieri. La présente gloire universelle du premier compositeur ayant joué aux dépens de la notoriété désormais plus discrète du second !

Ce fil conducteur bénéficie des atouts indéniables de la compagnie Opera Fuoco, vaillant atelier lyrique de jeunes solistes pourvu d’un orchestre sur instruments d’époque qui sous l’égide de David Stern (photo) poursuit son chemin florissant depuis 2003. En outre, la mise en scène, toute simple comme il convient à ces deux œuvres sans prétentions, s’adapte tout à fait au projet. Ned Grujic se contente d’un plateau nu, d’une table et d’une chaise, entre lesquels les intervenants s’ébattent dans des gestes et mouvements virevoltants sous des lumières bien placées devant la trentaine d’instrumentistes en arrière-fond. Car en sus de leur chant, les solistes ne manquent pas de bagout et d’aplomb. Et tout autant les deux comédiens, Loïc Richard et Patrick Messe, à qui échoient les dialogues (en français et quelque peu remaniés) du petit Singspiel de Mozart.

© OFart
  
Theodora Raftis et Axelle Fanyo sont deux sopranos à la carrière déjà bien lancée, dont elles livrent le témoignage dans des vocalités et une prestance éblouissantes. Leurs compagnons, issus de l’atelier lyrique, ne sont pas en reste de verve et de chant bien senti chez la soprano Dania El Zein, le ténor Sahy Ratiananaivo, le baryton-basse Olivier Gourdy et le baryton Olivier Bergeron. Puisque les participants de cette compagnie sise en région parisienne proviennent, on l’aura compris, de contrées les plus internationales. Sous la battue claire de David Stern au sein de l’excellente acoustique de la Salle Ravel, resplendissent les cinq numéros musicaux du Singspiel ainsi que les arias et ensembles entrecoupés de récitatifs bien menés de l’opera buffa. Comme au premier jour, veut-on croire... On regrette seulement que ce pétillant spectacle en reste là, pour une seule soirée, sans reprise prévue dans l’immédiat. Souhaitons, devant ce succès, que d’autres théâtres et institutions soient piqués au vif.
 
Pierre-René Serna

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Mozart : Der Schauspieldirektor ; Salieri : Prima la musica e poi le parole – Levallois-Perret, Salle Ravel, 29 mars 2018 / operafuoco.fr/

Photo © OFart

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