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« Songs of Winter » par Marie-Laure Garnier et Célia Oneto-Bensaid – La diva qui chauffe – Compte-rendu

Il ne faisait pas chaud en ce dimanche après-midi, mais Salle Cortot, on aurait pu se croire dans quelque église baptiste du sud des Etats-Unis, et on s’étonnait presque qu’aucun membre du public ne se lève pour proclamer sa foi en Jésus. Ce bouleversement des habitudes parisiennes, et cette chaleur instaurée dans la salle, on les devait à Marie-Laure Garnier et à Célia Oneto-Bensaid qui avaient choisi d’interpréter, à l’approche des fêtes de fin d’année, tout un bouquet de spirituals harmonisés par divers compositeurs, les arrangements les plus originaux étaient incontestablement ceux qui forment la Cantata de John Daniels Carter (1932-1981). Deux bis devaient contribuer à chauffer encore un peu plus la salle, notamment « Wade in the Water », où la soprano réussit à faire chanter l’auditoire. Parmi les pièces sacrées formant la deuxième partie du concert du dimanche 30 novembre, l’Ave Maria de William Gomez (1939-2000) était sans doute la plus dispensable, malgré sa joliesse post-puccinienne. Et l’on pourra s’étonner qu’ait été inclus « O Holy Night », titre sous lequel se dissimule en fait Minuit, chrétiens d’Adolphe Adam, qu’il aurait peut-être été possible de chanter en français, quitte à rompre la continuité linguistique avec les spirituals.

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Avant d’en arriver là, Marie-Laure Garnier avait proposé un programme plus européen, rapprochant Schubert et Dvořák. Ce n’est pas un hasard si, lors de son passage par le Conservatoire de Paris, la soprano avait notamment incarné la Cantatrice dans Reigen de Philippe Boesmans : une diva, Marie-Laure Garnier en est bien une, non parce qu’elle en aurait les caprices, mais parce qu’elle en a la majesté, la simplicité et surtout la voix. Les quatre lieder de Schubert permettent à la chanteuse de se chauffer, avec d’abord un « An die Musik » qui ne sollicite pas ses moyens outre mesure mais impose au contraire de les discipliner strictement. « Ständchen » permet de donner un peu plus libre cours à ses capacités, et l’on admire dans « Abschied » qu’une voix aussi large ne sacrifie en rien la netteté de l’articulation. Mais c’est avec « Die junge Nonne », scène d’opéra miniature, que Marie-Laure Garnier peut déployer la générosité de ses aigus et le dramatisme dont elle est capable. Les Zigeunermelodien de Dvořák sont données en allemand, selon une tradition illustrée par les plus grands artistes non-tchécophones. Là encore, on entend à quel point le jeu de Célia Oneto-Bensaid, loin de simplement accompagner le chant, s’impose à parts égales avec la soprano, formant un véritable duo avec elle, comme deux voix s’entrelaçant. Souhaitons longue vie à ce tandem artistique, et puisse-t-il trouver encore bien d’autre occasions d’offrir sa chaleur aux mélomanes.

Laurent Bury
 

« Songs of Winter », Salle Cortot, Dimanche 30 novembre, 16h
 

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