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Orlando au théâtre de Caen – Folle nuit au musée avec Haendel – Compte rendu

Je t’aime, moi non plus ; et réciproquement. A moins que ce ne soit le contraire ! Le livret d’Orlando est difficile à résumer. Certes, cet ouvrage, créé à Londres en 1733, marque le retour de Haendel à l’opéra magique, mais ce sont bien les passions amoureuses contrariées, les souffrances, la jalousie, la vengeance et la folie qui constituent la trame réelle de cette histoire complexe, inspirée du Roland furieux de l’Arioste. Qu’importe, l’essentiel est ailleurs. D’abord dans la musique de Haendel. Du grand art ! La partition, un sommet de l’opera seria, traduit avec subtilité et justesse la tragédie qui se joue. Evidemment, les airs de déploration et de furie ne manquent pas, mais Orlando offre aussi une série de récitatifs accompagnés et un nombre d’ensembles vocaux assez inhabituels (un trio, trois duos et le chœur final).

© Jean-Louis Fernandez
Folle énergie
Pour les représentations données à Caen, Christophe Rousset a retrouvé, avec bonheur, ses Talens Lyriques (pour les quatre représentations en octobre, à Nancy, il avait dirigé l’orchestre de l’Opéra national de Nancy-Lorraine). L’orchestre est un acteur essentiel du drame qui nait d’abord la fosse : folle énergie, intensité dramatique, volupté champêtre…aucun affect n’est négligé, aucune intention musicale n’est survolée. Christophe Rousset a travaillé la partition dans les moindres détails et tous les pupitres des Talens Lyriques méritent des éloges. Sur le plateau, le résultat est tout aussi convaincant. Le cast est très homogène : Noa Beinart (Orlando), Mélissa Petit (Angelica), Rose Naggar-Tremblay (Medoro), Michèle Bréant (Dorinda) et Olivier Gourdy (Zoroastro) sont en parfaite harmonie vocale et leur technique n’est jamais prise en défaut, malgré la musique parfois vertigineuse composée par Haendel.

© Jean-Louis Fernandez
Des élèves turbulents au musée
Pour donner du mouvement à un opéra plus psychologique qu’héroïque, la metteuse en scène Jeanne Desoubeaux (ancienne élève du Conservatoire de Caen) a choisi de transposer l’action de nos jours dans un musée. Clin d’œil évident et assumé à la série de films « La nuit au musée ». Montagnes, forêt, cabane de bergers, bosquets et grotte cèdent la place à une salle de musée visitée par un groupe d’élèves turbulents. Quatre d’entre eux, plus audacieux que les autres, vont se laisser enfermer et passer la nuit au milieu des œuvres d’art qui vont s’animer. Peintures et sculptures sont en fait les héros de l’opéra et les élèves, d’abord spectateurs, vont devenir leur double, en reproduisant leur gestuelle de manière enfantine. L’idée, très originale, donne lieu à des tableaux vivants, drôles ou poétiques, et le caractère magique de l’opéra se manifeste ainsi d’une manière inattendue et séduisante.
Thierry Geffrotin

Haendel : Orlando – Caen, Théâtre, 4 novembre 2025
https://theatre.caen.fr/spectacle/orlando
Photo © Jean-Louis Fernandez
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