Journal
Klaus Mäkelä et l'Orchestre de Paris aux Prem’s de la Philharmonie – Inoxydable Varèse – Compte-rendu

Malgré un programme moins convenu (Brahms, Dvořák, Mahler, Verdi...) que les orchestres (de Leipzig, Berlin et Milan) participant à ces Prem's, festival symphonique de la Philharmonie de Paris, l'Orchestre de Paris fait, lui aussi, salle pleine. Excellente nouvelle. Programme moins convenu pour ne pas dire beaucoup plus original, organisé autour d'un axe France-États-Unis des XXe et XXIe siècles.

Vincent Lucas et Klaus Mäkelä © Denis Allard
Avec fanfare(s)
Chacune des deux parties du concert débute par une fanfare américaine, mobilisant comme il se doit les cuivres et les percussions : la Fanfare for the Uncommon Woman n° 1 de Joan Tower, crée en 1987, dont il s'agit vraisemblablement de la première française, répond ainsi à la fameuse Fanfare for the Common Man de Copland. Efficaces et mobilisatrices, elles trouvent en la Philharmonie un espace acoustique adapté à leur volume sonore.
Maigre substance
Les Danses concertantes de Guillaume Connesson, présentées en création française, et leur orchestre « Mozart » (avec percussions !) ne réclament pas de telles dimensions et ne cherchent pas l'effet de masse. On se demande d'ailleurs ce que cherche cet exercice de virtuosité pour flûte et orchestre qui semble se souvenir de Jean Françaix. L'orchestration, dont le compositeur est, on le sait, un maître, reste assurément séduisante, colorée et limpide à la fois, mais la substance reste bien maigre, sans l'invention rythmique (malgré le titre) dont Connesson peut faire montre. Elle permit néanmoins à Vincent Lucas, première flûte solo de l'Orchestre de Paris, de rappeler son insolente maîtrise instrumentale et déployer sa sonorité solaire et à ses collègues de faire montre d'une grande finesse, sous la direction attentive de Klaus Mäkelä.

© Denis Allard
Folie orchestrale
Mais le contraste avec Un Américain à Paris de Gershwin, ivre de mélodies et de rythme, ne faisait que souligner la minceur du propos de Connesson même s'il est possible d'imaginer davantage de swing de la part d'un orchestre, en grande formation il est vrai, à la pâte parfois un peu straussienne.
C'est quand même pour Amériques de Varèse qu'on venait et c'est après Amériques qu'on repartit avec des étoiles dans les yeux et les oreilles. Cette folie orchestrale qui mobilisait pas moins de quinze (!) percussionnistes, huit cors, sept trompettes, cinq trombones, deux tubas, fait non seulement un vacarme de tous les diables mais emporte l'auditeur dans un monde véritablement inouï, étrange, inquiétant, réjouissant. Un siècle après sa composition cette œuvre insensée n'a rien perdu de son pouvoir de fascination et a permis à l'orchestre et à son chef de se couvrir de gloire. Triomphe mérité.
Un concert dont le premier violon solo se nommait Benjamin Gilmore. Rappelons que Sarah Nemtanu vient d'être nommée à ce poste et prendra ses fonctions le 1er janvier prochain. Quant à la direction de l'Orchestre de Paris, on a appris récemment qu'Esa-Pekka Salonen y succédera à Klaus Mäkelä à compter de 2027 (pour un mandat de cinq ans) en tant que chef principal – il sera de surcroît titulaire de la chaire Création et innovation de la Philharmonie de Paris.
Philippe Venturini

Paris, Philharmonie, 11 septembre 2025
Photo © Denis Allard
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