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« Mélanges », hommage à Hugues Gall (Ed. Gourguff Gradenigo) – L’homme qui aimait la peinture, les fleurs, la musique et la danse – Compte rendu

On ne peut pas avoir eu la carrière éblouissante d’Hugues Gall (1940-2024), qui fut, entre autres fonctions prestigieuses, Directeur de l’Opéra de Paris pendant neuf ans, jusqu’en 2004, ce après celui de Genève (1980-1995), sans s’être fait quelques ennemis, mais surtout beaucoup d’amis. Car l’homme était hors normes, par son caractère difficile, son côté implacable, en même temps que sa clairvoyance, sa passion pour la musique, son art de composer des équipes, ses saillies, son humour à froid, qui pouvait décontenancer, sa phénoménale culture, et plus cachée, une sensibilité extrême que contenait une sorte de réserve, de dureté.
Un bouquet de pensées
Beaucoup d’amis donc, que Martine Kahane, Conservateur au verbe fabuleux , Directrice de la Bibliothèque-Musée de l’Opéra de 1972 à 1994, grâce à laquelle a pu prendre naissance le Centre du Costume de Scène à Moulins, a frétés, avec quelques fidèles, dont Pierrette Chastel, qui fut, en ce temps faste, attachée de presse à l’Opéra, pour composer ce Mélanges : un élégant livre bleu, délicat bouquet de pensées cueilli auprès de 65 personnes. Après la reprise du Communiqué de l’Elysée, publié le lendemain de son décès, le 26 mai 2024, s’ouvre le défilé de personnalités qui partagèrent de grands moments avec lui, ou de figures plus modestes mais dont Hugu es Gall avait su déceler le talent. Ils l’évoquent tous avec une émotion palpable et une admiration sans failles.
Une personnalité insaisissable mais fascinante
Parmi les vedettes, évidemment, la diva Renée Fleming dont le splendide Capriccio célébra les adieux du directeur de l’Opéra, le superbe chef James Conlon, le brillant Robert Carsen, l’incontournable Brigitte Lefèvre, et même des altesses, avec un petit mot de S.A.I. Farah Pahlevi. Quelques photos touchantes, collectées avec difficulté, où on le voit aux côtés de Maurice Béjart, Maria Callas, Yvette Chauviré, Rolf Liebermann, son idole, Claudio Arrau, ou tout jeune homme face au pape Jean XXIII, ponctuent ce flot de mots émus, de souvenirs piquants ou farfelus, d’hommages parfois sidérés par la personnalité insaisissable mais fascinante de cet homme en qui la sensibilité artistique se mariait avec un sens aigu du service public. L’air malin d’un renard, mais droit comme un if !
La marque des conflits à l’Opéra de Paris
L’évocation la plus touchante revenant peut être à Olimpia Weiller, son amie pendant plus de quarante ans, qui souligne combien ses années difficiles, marquées par des conflits incessants, à l’Opéra de Paris, le meurtrirent, et laissent songeur: « il en perdit, écrit-elle, jusqu’à son amour de la musique… Après sa retraite, il n’en écoutait plus et n’allait presque plus au spectacle ». Nul besoin de mettre des fleurs sur sa tombe, où l’a rejoint quelques jours après sa mort, son mari, le danseur Eric Vu An, puisqu’il dort au milieu, chez Claude Monet, dans le cimetière de Giverny, dont il dirigea la prestigieuse Fondation jusqu’en 2024.
Jacqueline Thuilleux

« Mélanges » Hugues R. Gall - Ed. Gourguff Gradenigo, 240 pages / 32 €. En vente dans les boutiques des Opéras de Paris, Lyon, Nice et Bordeaux et sur www.gourcuff-gradenigo.com/librairie/index.php?id_product=340&controller=product&id_lang=4

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