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Une interview de Samuel Jean, Premier chef invité de l'Orchestre Régional Avignon-Provence - « Il y a une vraie dynamique autour de cet orchestre ! »
Après avoir traversé une zone de turbulences, l’Orchestre Régional Avignon Provence (ORAP) repart d’un bon pied et reprend confiance grâce à Samuel Jean, son Premier Chef invité depuis le 1er janvier 2013. Fort de l’accueil très positif dont a bénéficié un récent et bel enregistrement du Docteur Miracle de Bizet, l’ORAP attaque, le 11 octobre, une saison 2013-2014 où la musique et les interprètes français occupent un place privilégiée.
Dans quelles circonstances avez-vous été amené à occuper le poste de Premier Chef invité de l’Orchestre Régional Avignon Provence ?
Samuel Jean : J’ai été invité pour la première fois par l’orchestre en février 2010 et j’y suis revenu régulièrement en tant que chef invité. Progressivement l’idée a germé dans l’esprit de Philippe Grison (Directeur général de l’ORAP) que j’étais la bonne personne pour m’occuper de cette formation. J’ai un parcours pluriel, l’opéra bien sûr, mais aussi le symphonique, le jazz, la musique contemporaine, etc. Les choses se sont passées naturellement ; Philippe Grison a proposé au Conseil d’administration ma nomination au poste de Premier Chef invité et elle a été acceptée à l’unanimité. L’une des premières choses que j’ai souhaité faire, en accord avec le Directeur, c’est que l’on parle de l’orchestre autrement que de façon négative, avec une épée de Damoclès au dessus de la tête. Il fallait mettre l’accent sur l’aspect artistique. Nous nous sommes donc lancés dans deux enregistrements : Peter Pan, un beau conte musical d’Olivier Penard, puis Le Docteur Miracle de Bizet (pour le label Timpani). Un disque très bien accueilli par la critique, en France comme à l’étranger. C’était le but ; que l’on parle de l’orchestre de manière positive et artistique. Nous continuons dans cette voie : je termine tout juste l’enregistrement de L’Amour masqué d’André Messager. J’insiste pour l’instant sur ce répertoire car, outre que je l’adore, je pense qu’il souffre d’un déficit d’enregistrements. Il met par ailleurs l’orchestre en valeur sans l’exposer de manière trop dangereuse, mais je pense que nous irons progressivement vers d’autres répertoires.
Votre concert inaugural du 11 octobre propose un original programme Hérold, Alkan, Rossini, Saint-Saëns (avec le remarquable Romain Descharmes au piano) et Bizet. Quel est le profil général de la saison qui s’ouvre ?
S. J. : Nous sommes dans une saison un peu « anniversaire » dans le sens où nous nous sommes rendu compte que l’Orchestre d’Avignon, en tant que formation constituée et permanente, existe depuis le début du XIXe siècle. Notre saison 2013-2014 retrace la vie musicale à Avignon de 1814 à 1914. Nous avons un partenariat important avec le Palazzetto Bru Zane ; Etienne Jardin, coordinateur scientifique du Palazzetto, a beaucoup travaillé sur les archives d’Avignon. L’axe musique française est très important, mais tout ne s’y résume pas, car on donne aussi des œuvres étrangères qui étaient jouées à l’époque. Parmi les curiosités françaises qui seront proposées cette saison, on trouve par exemple, en avril, Le Dilettante d’Avignon, opéra-comique de Halévy. Je ne pouvais malheureusement pas le diriger car je suis à la Monnaie à ce moment. Michel Piquemal se chargera donc de faire découvrir cette partition délicieuse au public en version de concert.
Autre caractéristique de la saison, nous n’avons que des chefs français et des solistes français, à de très rares exceptions près. Ce n’est pas du chauvinisme, mais nous avons des artistes formidables dans ce pays qui ne sont pas toujours valorisés comme il le faudrait. Et puis c’est un peu aussi une forme de réaction vis à vis de ces orchestres français qui n’invitent pratiquement que des chefs et des solistes étrangers. Nous ne le ferons pas chaque année, mais c’est un signal important.
Nous avons je crois une saison vraiment cohérente, avec un mélange d’œuvres populaires et d’autres méconnues, comme lors du concert inaugural du 11 octobre où l’on trouve aussi bien l’ouverture de Zampa de Hérold, que le Concerto da Camera n°1 d’Alkan et le Concerto pour piano n°2 de Saint-Saëns.
Le terme « lyrique » a disparu du nom de l’Orchestre d’Avignon…
S. J. : En effet, il y avait une confusion, qui existe encore un peu mais de moins en moins, entre l’activité propre de l’orchestre et celle qu’il exerce à l’Opéra d’Avignon. Le lyrique est une part importante, fondamentale même, de la vie de l’orchestre mais ça ne représente que 30% de son activité. Les 70% qui restent sont occupés par les concerts d’abonnement, les concerts en région, les créations, les concerts jeune public. Il n’y pas de polémique ; la disparition du terme « lyrique » a simplement pour but de rendre les choses plus claires dans l’esprit des gens, de montrer que l’orchestre est indépendant de l’Opéra.
Comment le public réagit-il aux évolutions de l’orchestre ?
S. J. : Le public a plus que doublé en l’espace de trois ans. 65000 personnes sont venues écouter l’orchestre l’an dernier. L’activité jeune public touche 25000 enfants (qu’ils s’agisse des projets auxquels ils participent ou des générales qu’ils ont la possibilité de suivre). En février prochain nous donnerons en création mondiale le Ali Baba du jeune compositeur Damien Lehman. 25000 enfants, c’est un chiffre important sur une ville de la taille d’Avignon. Il y a une vraie dynamique autour de cet orchestre ! Le disque y a contribué et ça nous conforte dans notre mission.
Quels sont vos projets en dehors d’Avignon dans les mois qui viennent ?
S. J. : En tant que pianiste, un disque de mélodies de Pierné, avec Sabine Revault d’Allonnes et Thomas Dolié, va sortir dans les jours qui viennent chez Timpani. C’est de le très belle musique, trop peu connue ; notamment un cycle de Paul Fort, absolument extraordinaire. Je suis vraiment heureux d’avoir pu réaliser ce disque.
Côté baguette, outre les huit à dix semaines que je passerai à Avignon durant la saison, je dirigerai Orphée aux enfers à l’Opéra de Marseille en décembre, puis Rigoletto à la Monnaie au printemps ; j’y serai assistant de Carlo Rizzi et je conduirai un certain nombre de représentations. Je suis heureux de revenir pour la deuxième fois à La Monnaie ; de revenir un répertoire plus « traditionnel » aussi. Je ne cache pas que j’aimerais en faire un peu plus souvent.
Propos recueillis par Alain Cochard, le 26 septembre 2013
Orchestre Régional Avignon Provence
Samuel Jean, dir. / Romain Descharmes, piano
Œuvres de Hérold, Alkan, Rossini, Saint-Saëns & Bizet
11 octobre 2013 – 20h30
Avignon – Opéra
www.orchestre-avignon.com
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Photo : PicturingtheDark
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