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Une interview de Barbara Eckle, directrice de l’Opéra de Lille – « L’Opéra est une idée, un concept à définir à chaque fois qu’on a le privilège de concevoir un programmation. »

 
 
Une page se tourne à l’Opéra de Lille. A la tête de l'institution depuis 2003, Caroline Sonrier passe le relai à Barbara Eckle (photo). Forte de sa riche expérience du monde lyrique et de son goût pour les aventures artistiques nouvelles, la Suisso-allemande a élaboré sa première programmation au cours d’une période de transition particulièrement harmonieuse. On l’a rencontrée, pour faire plus ample connaissance avec une personnalité originale et enthousiaste, pour découvrir aussi les « constellations » autour desquelles s'organise la saison lilloise 2025-2026.

 
 
 
Avant d’aborder la prochaine saison de l’Opéra de Lille, j’aimerais que vous choisissiez, parmi vos souvenirs, trois ou quatre moments clés qui, selon vous, ont contribué de manière décisive à façonner la personnalité de la femme et de la directrice d’opéra que vous êtes.
 
L’un de mes tout premiers souvenirs, très important, remonte à mes 8-9 ans. Mon père était directeur de théâtre en Suisse – à Coire –, un lieu où Bertold Brecht est passé durant son exil et où son Antigone a été créée en février 1948. Pour le 40anniversaire de cette création mon père avait décidé de monter la pièce, avec certains acteurs de la création encore vivants à l’époque, des exilés eux aussi, et des membres du Berliner Ensemble, venus de RDA. Je tenais le rôle de l’enfant dans le prologue. La préparation du spectacle à duré environ trois mois. Une période merveilleuse, où je vivais parmi tous ces gens, où j’étais impliquée. J’ai compris là ce qui signifie être sur scène, et j’ai pu suivre le processus d’élaboration du spectacle. J’en faisais vraiment partie, j’assistais à toutes les répétitions. Cette Antigone a été invitée en octobre 1989 à Berlin Est, au Theatertreffen, juste avant la chute du mur. L’atmosphère était particulière, très intense. Un souvenir extrêmement marquant, vous pouvez l’imaginer, pour l’enfant que j’étais alors.
 
Un peu plus tard, adolescente, j’avais une professeure de violon nommée Julia Galić. En la regardant jouer, j’ai compris quelque chose de très important, sur l’expression de la musique, sa dimension corporelle et sur l’unité de la pensée, de l’être physique et de l’émotion que l’on peut transmettre au moyen d’un instrument.
 
J’avance un peu dans le temps : à l’Université Oxford, où j’étudiais les langues anciennes, la philologie grecque et latine, j’ai croisé des professeurs passionnants. Je garde un souvenir particulier de Katherine Clarke qui m’a appris que la science, surtout dans l’histoire ancienne, c’est aussi de la créativité, ça naît de la créativité, de l’inspiration, de l’échange. J’étais un peu déchirée entre l’art, la créativité et la science des lettres. Elle m’a fait comprendre qu’autour d’un document on peut inventer un monde, que science et créativité ne sont pas incompatibles.

 
« Lorin Maazel parvenait à tout exprimer par le geste. »

 
Je terminerai par ma rencontre avec le chef Lorin Maazel. J’étais à New York à l’époque et, dans le cadre d’un programme de home schooling, je donnais des cours de latin à son fils. Je venais de terminer mes études à Oxford, j’étais un peu perdue, incertaine quant à mon avenir. Lorin Maazel m’a proposé de venir assister à des répétitions du New York Philharmonic, ce que j’ai fait avec grand plaisir. Nous avons beaucoup discuté. À l’époque, il se lançait dans le projet de son opéra 1984, d’après le roman d’Orwell ; il était en discussion avec les librettistes. Au bout de quelques semaines, il m’a proposé de rester à New York pour travailler avec lui sur la production de son opéra. Ce que j’ai fait, pendant trois ans et demi, sur 1984 et sur d’autres projets aussi. Je découvrais un monde auquel on n’a généralement pas accès à l’âge de 23 ans. J’étais la coordinatrice artistique de son opéra. Il était très souvent en voyage pour des concerts et je l’accompagnais avec d’autres personnes impliquées dans le projet.

Avant de connaître Lorin Maazel, j’avais en tête des chefs d’orchestre qui parlent beaucoup pour inspirer les musiciens. C’était tout le contraire avec lui. J’étais presque un peu déçue au départ et puis, peu à peu, j’ai compris que tout était transmis par ses mains. Il parvenait à tout exprimer par le geste.
Cela a été une collaboration particulièrement enrichissante, où cours de laquelle on m’a donné à faire des choses que je ne savais pas faire. Je suis un peu habituée à ça désormais : à me plonger dans l’eau froide pour apprendre à nager. On a un peu peur au début, mais on découvre très vite que l’on est capable de s’adapter et de se développer.

 
 

© Opéra de Lille

 
« J’avais envie de poursuivre à l’étranger, envie de trouver une nouvelle « eau froide ». »

 
 
L’Opéra de Lille marque le début d’une nouvelle aventure, que vous abordez forte d’une riche expérience en Allemagne. Qu’est-ce qui vous a amenée à présenter votre candidature à la direction de l’Opéra de Lille ?
 
 
Après avoir passé beaucoup de temps dans des pays anglophones, je n’avais pas forcément envie de revenir vivre en Allemagne, mais c’est un pays où la musique contemporaine occupait un grand rôle, à la différence de l’Angleterre et des Etats-Unis. Je ne connaissais pas trop la France à l’époque. Après avoir terminé des études de cinéma à Prague, je me suis donc installée à Berlin et j’ai poursuivi mon parcours, dans le domaine de la musique contemporaine. J’ai réalisé quelques documentaires sur le sujet et j’ai surtout fait de la radio.
Je suis ensuite partie à Stuttgart où j’ai été en activité comme dramaturge pendant deux ans, avec de devenir en 2020 directrice de la dramaturgie au Festival Ruhrtriennale responsable de la programmation d’opéra et de concerts. Une très belle expérience mais, au bout de trois ans, quand le mandat de Barbara frey, la directrice du festival, s’est achevé, j’ai eu envie envie de poursuivre à l’étranger, envie de trouver une nouvelle « eau froide ».
À la Ruhrtriennale nous avions passé commande d’un opéra à Georges Aperghis : Die Erdfabrik. En 2022, alors que nous allions démarrer les répétitions, un message de l’Opéra de Lille est arrivé, qui nous faisait part de son envie de coproduire le spectacle. Ma curiosité a été mise en éveil, je me suis renseignée sur cette maison, j’ai vu qu’il s’y passait des choses très intéressantes.
Un peu plus tard, alors que j’approchais de la fin de mon mandat à la Ruhrtriennale, Boris Ignatov, que je connais depuis l’époque de Stuttgart  – il est désormais notre conseiller à la distribution à Lille et occupait les mêmes fonctions à la Ruhrtriennale –, m’a informée que l’Opéra de Lille cherchait une nouvelle direction. Et j’ai présenté ma candidature.

 
« Nous avons défendu l’idée d’un Opéra totalement ouvert dans les styles musicaux. »

 

 
Quelles étaient les lignes de force de votre projet ? Par quelle vision d’une institution lyrique au XXIe siècle avez-vous emporté la décision de ceux qui ont retenu votre candidature ?
 
Le projet a été élaboré en collaboration avec le dramaturge Miron Hakenbeck, que je connais depuis Stuttgart. Nous avons défendu l’idée d’un Opéra totalement ouvert dans les styles musicaux. Je dis toujours que l’Opéra n’est pas un bâtiment, mais une idée, un concept à définir à chaque fois qu’on a le privilège de concevoir un programmation. Nous étions déjà inspirés par le projet de Caroline Sonrier, qui allait dans le sens d’une ouverture, d’une compréhension de l’Opéra comme un art vivant.
 Ce sur quoi, avec mon équipe, je voudrais mettre l’accent, c’est la pertinence des œuvres, d’hier comme d’aujourd’hui, pour notre époque. Depuis les tragédies de Sophocle, les histoires sont des archétypes ; elles ont toujours une pertinence, même si les paramètres ont complètement changé. Mais les metteurs ou metteuses en scène que nous invitons abordent les ouvrages toujours sous un angle contemporain.
 
 
« J’ai vraiment eu le sentiment que tout le monde était dans le bateau avec moi. C’est un très grand plaisir de travailler ainsi. »
 
 
 
À la différence de directeurs d’opéra qui prennent leurs fonctions avec une première saison concoctée par leur prédécesseur, la saison 2025-2026 sera entièrement de votre main, puisque vous avez pu y travailler depuis le début de 2024, parallèlement à la fin du mandat de Caroline Sonrier. Comment s’est déroulée cette période de transition ?
 
Un véritable modèle pour moi ! Ce n’est pas toujours une situation simple, il m’est arrivé de voir des transitions compliquées, où tout l’argent est dépensé avant l’arrivée du nouveau directeur, où de petites mesquineries se produisent ... Ça aura été tout le contraire ici. Caroline à toujours dit qu’elle se réjouissait de me voir prendre sa succession. J’ai été accueillie chaleureusement avec un projet où elle voyait une continuité avec ce quelle avait construit à Lille, mais aussi une évolution amenée par quelqu’un d’une autre génération. Nous avons beaucoup échangé ; elle m’a expliqué le territoire, les partenaires, le mode de fonctionnement de l’Opéra de Lille.
Quand un changement intervient après vingt-deux ans, il peut évidemment y avoir des appréhensions dans les équipes. Mais une fois que je leur ai présenté le projet, la programmation, j’ai vraiment eu le sentiment que tout le monde était dans le bateau avec moi. C’est un très grand plaisir de travailler ainsi.

 

© Opéra de Lille

 
 
« L’idée de « constellation » part de l’envie de créer un petit monde autour de l’œuvre programmée. »
 
 
 
Avant d’en venir aux quatre ouvrages autour desquels la saison 2025-2026 est construite, pouvez-vous nous donner plus détails, sur le mode d’organisation de ses différentes parties, intitulées « constellations » ?
 
C’est une idée qui vient sans doute un peu des dramaturges que nous sommes, moi et Miron Hackenbeck. Elle part de l’envie de tirer des thèmes de l’œuvre lyrique programmée, de créer autour d’elle, pendant deux mois, deux mois et demi, un petit monde avec des sujets reliés entre eux (récital lyrique, danse, concert, ciné-concert, etc.).
 
Un nouveau format, baptisé « Open Week », va apparaître. Nous l’avons conçu pour intéresser le public à l’ouvrage en cours de répétition, mais aussi pour ouvrir l’Opéra, gratuitement, à un large public. Deux semaines à peu près avant la première, le Grand Foyer sera ouvert tous les soirs, de 18h à 22h. Les gens pourront faire des découvertes dans un cadre joyeux, où ils trouveront aussi un bar, un jukebox, une petite piste de danse. Il y aura un coin pour de petits concerts, de petites conférences, des rencontres avec des artistes de la production auxquels le public pourra aussi poser des question sur le travail en cours.
 
Je prends l’exemple du premier ouvrage de la saison, L’Ecume des jours de Denisov, d’après Boris Vian, où le jazz de Duke Ellington joue un rôle important. L’« Open Week » permettra de bénéficier de cours de swing, il y aura un « pianocktail », le jukebox diffusera des musiques en relation avec le thème. Chacun à sa manière pourra prendre part à cette forme de salon populaire qu’est l’« Open Week », faire un passage rapide au Grand Foyer ou y rester quatre heures, comme il lui plaira.
 
Dans une ville comme Stuttgart, l’Opéra est ouvert pratiquement tous les soirs. Le mode fonctionnement est très différent à Lille. On ne peut pas prétendre que l’Opéra est « ouvert » quand la plupart du temps il est fermé ! Nous nous sommes dit qu’il fallait inventer quelque chose : c’est la raison d’être de l’«Open Week ».

 
« Pour attirer une nouveau public, qui n’a jamais osé franchir la porte de l’Opéra, nous avons imaginé le « concert sieste » où le public est allongé sur des nattes. »

 
 
Des concerts « Sieste » et « Insomniaque » font aussi leur apparition ...
 
Une série de concerts (en format de chambre, dans des styles variés), le mercredi à 18h, existait depuis très longtemps à l’Opéra de Lille, avec un grand succès auprès d’habitués. Pour attirer une nouveau public, qui n’a jamais osé franchir la porte de l’Opéra, nous avons imaginé le « concert sieste » où le public est allongé sur des nattes. Il ne s’agit aucunement de concerts de moindre qualité et pour les auditeurs fidèles de l’ancienne formule ce sera une façon d’écouter la musique autrement. Mais il y aura également des concerts de format traditionnel pour ceux qui le préfèrent. A titre personnel, c’est une chose que j’apprécie beaucoup ; la position allongée permet une concentration bien plus grande.
Sur le même principe, le pendant du concert sieste sera le concert insomniaque, de 21 h à 1 ou 2 h du matin, divisé en trois parties, la dernière souvent occupée par de la musique électronique.

 

Constellation d'automne © Opéra de Lille

 
« L’approche très libre de la musique et de l’opéra que manifeste Denisov correspond bien à ce que nous voulons faire à l’Opéra de Lille. »
 

 
 
Venons-en aux quatre « constellations » qui forment la saison 2025-2026, avec, vous l’avez déjà mentionné, L’Ecume des jours d’Edison Denisov (1929-1996), au cœur de la Constellation d’automne. Un choix pour le moins original. Comment vous est venue cette idée ?
 
C’est une partition qui a été créée à Paris, à l’Opéra-Comique, en 1986, puis reprise à Perm, en Sibérie, en 1989. Grâce à Sylvain Cambreling, l’ouvrage a été redonné en 2012 à Stuttgart, avec un très grand succès ! C’est là que je l’ai découvert. J’ai adoré et j’ai pu mesurer combien le public appréciait l’écriture polystylistique et la liberté de Denisov. Je n’ai jamais compris pourquoi ça n’avait jamais été redonné en France, où Boris Vian est beaucoup plus lu et populaire qu’en Allemagne. L’Ecume des jours m’a paru constituer une excellente option pour le commencement de la saison. L’approche très libre de la musique et de l’opéra que manifeste Denisov correspond bien à ce que nous voulons faire à l’Opéra de Lille. La nouvelle production que l’on découvrira sera dirigée par Bassem Akiki, chef d’origine libanaise installé en Pologne, également compositeur et qui, à l’instar de Denisov, a étudié les mathématiques. Il a dirigé pas mal d’œuvres lyriques hors normes, de Raskatov entre autres, et présente donc un profil qui correspond bien une partition pour laquelle il a manifesté un immense enthousiasme dès que je la lui ai envoyée.
Anna Smolar signera la mise en scène. Franco-polonaise, elle est d’abord connue en Pologne, un peu en Allemagne aussi, dans le domaine théâtral. Son langage mélange légèreté, humour et profondeur, d’une façon assez hétérogène qui correspond bien à l’esprit de l’œuvre de Denisov. Ce sera sa toute première mise en scène d’opéra, mais la musique a toujours joué un grand rôle dans ses productions théâtrales, d’un caractère très rythmé.

 

Constellation d'hiver © Opéra de Lille

 
 
« L’histoire d’Emilia Marty parle à notre époque, souvent à la recherche d’une jeunesse éternelle. »
 
 
 
 
Janáček sera pour sa part au cœur de la Constellation d’hiver ...
 
En effet et avec une œuvre tardive, L’Affaire Makroupolos. Après Denisov, Janáček offre un autre exemple de langage musical très personnel et singulier. Toute sa musique se nourrit de la langue tchèque parlée, de son expressivité. Une démarche unique au début du XXe siècle et d’une extrême modernité. L’histoire d’Emilia Marty parle à notre époque, souvent à la recherche d’une jeunesse éternelle.
La production que l’on découvrira vient de l’Opéra d’Anvers où Kornel Mundruszó l’a présentée en 2016. De toutes les mises en scène que j’ai pu voir de cette œuvre, c’est ma préférée. Elle arrive à résoudre le conflit d’une femme, héroïne certes mais pas aimable, en faisant comprendre sa souffrance au public. Une mise en scène très atmosphérique aussi, qui parvient à refléter la vie intérieure des personnages. Véronique Gens incarnera Emilia Marty.
Quant à la direction musicale, elle sera assurée par Dennis Russel Davies, un chef que j’aime beaucoup et avec lequel j’ai travaillé à Stuttgart et à la Ruhrtriennale. Nous y avions donné De la maison des morts de Janáček. Une production mise en scène par Dmitri Tcherniakov, très compliquée, presque impossible à monter – avec l’orchestre à l’extérieur de la scène – au cours de laquelle Dennis Russel Davies a fait preuve d’un profond sens de l’adaptation. Ayant appris à connaître l’artiste dans Janáček, j’avais le souhait de le retrouver dans une autre réalisation tardive de ce compositeur.

 

Constellation de printemps © Opéra de Lille

 
« Avec Matthias Pirro nous avions la chance de disposer de quelqu’un jeune et déjà en possession d’une vraie expérience. »

 
Avec la Constellation de printemps, on revient, quelques mois après L’Ecume des jours, à une source française avec Les Enfants terribles de Philip Glass, d’après Jean Cocteau ...
 
Absolument, mais cette fois du côté américain. Vian, Cocteau : la présence de ces deux romans emblématiques de la littérature française du XXe siècle vus dans des perspectives culturelles complètement différentes me plait beaucoup. Avec Philip Glass on a affaire à un opéra de chambre – avec  seulement trois pianos à queue en fosse. Et à un langage très singulier une fois encore qui, par sa circularité, correspond ingénieusement à la situation de ces adolescents particuliers qui ne veulent pas devenir adultes.
Ces Enfants terribles seront donnés dans une nouvelle production signée d’un très jeune metteur en scène de 26 ans, Matthias Pirro. Il vient de terminer ses études à la Musikhochschule de Hambourg, mais fréquente l’univers lyrique depuis son adolescence. J’ai eu l’occasion de découvrir sa mise en scène de diplôme, pour Eugène Onéguine, vraiment remarquable et très ancrée dans sa génération.
 
Il m’a semblé important que quelqu’un de son âge pose son regard sur une œuvre telle que Les Enfants terribles. La génération à laquelle il appartient n’est guère présente à l’Opéra, ce qui est assez normal – un parcours de metteur en scène prend du temps. Avec Matthias Pirro nous avions la chance de disposer de quelqu’un de jeune et déjà en possession d’une vraie expérience : nous avons saisi l’occasion.
Virginie Dejos, très talentueuse cheffe d’orchestre et de chœur et formidable pianiste (qui sera en charge du Chœur de l’Opéra de Lille la saison prochaine) assurera la direction musicale d’une partition qu’elle a déjà abordée.

 

Constellation d'été © Opéra de Lille

« La jeunesse sera en fosse aussi, avec Riccardo Bisatti, chef italien né en 2000. »

 
Fin de saison avec un grand titre du répertoire : La Flûte enchantée figure au centre de la Constellation d’été. Ce sera la reprise donc d’une production, vue fin 2017 à l’Opéra-Comique, signée Barrie Kosky ...
 
Et Suzanne Andrade ! Une Flûte enchantée vraiment « enchantée » qui a beaucoup tourné dans le monde mais qui n’a jusqu’ici été présentée qu’une fois France. C’est une production tellement joyeuse et intelligente que e voulais la faire découvrir au public lillois. Elle s’adresse à des spectateurs de tous les âges et invite à s’interroger sur les épreuves de la vie à travers une approche très jeune et originale. La jeunesse sera en fosse aussi, avec Riccardo Bisatti, chef italien né en 2000. Un prodige que j’ai découvert dans Mozart et trouvé vraiment extraordinaire. Il saura, j’en suis sûre, traduire la légèreté et l’insouciance de la musique, tout en exprimant sa profondeur.

 
 
Avec l’«opéra itinérant », nous voulons amener les artistes sur le territoire et travailler plus en lien avec les lieux d’accueil. »

 
 
Ce Mozart fera-t-il l’objet d’une retransmission sur grand écran, comme l’habitude en a été prise chaque fin de saison ?
Plutôt que de proposer la diffusion d’un opéra en direct sur grand écran, nous nous sommes orientés vers une autre solution, qui sera présentée plus tôt dans la saison, au cours de la Constellation d’hiver. Il s’agira d’un « opéra itinérant », un projet pour la métropole et la région à partir du Château de Barbe-Bleue. Nous voulons avec ce nouveau dispositif amener les artistes sur le territoire et travailler plus en lien avec les lieux d’accueil sur les questions artistiques, de communication et d’accueil des publics. Certains lieux qui ont accueilli la retransmission sont par ailleurs des lieux avec lesquels on imagine ce projet d’opéra itinérant.
Le spectacle (dans un arrangement pour ensemble de chambre de Stephan Goldbach) a été créé à Leipzig en 2024 par Jeffrey Döring. Ce dernier voit dans l’ouvrage de Bartók une histoire sur la solitude dans un âge avancé et combien il devient difficile de partager sa vie, ses douleurs, ses regrets en progressant dans le temps. Jeffrey Döring a reçu il y a peu le Gerard Mortier Next Generation Award pour ce projet. Il a enregistré des témoignages de personnes âgées, isolées pour diverses raisons, et les a intégrés au spectacle. Nous l’avons découvert à Leipzig l’an dernier et nous nous sommes dit qu’il serait intéressant d’en réaliser une nouvelle version, avec des habitants de la région Hauts-de-France. Le spectacle sera donné à deux reprises à Lille et circulera en janvier et février dans la métropole et la région. À chaque représentation, le metteur en scène sera présent pour échanger avec les spectateurs. Ce contact direct du public avec les artistes me paraît extrêmement important.
 
Propos recueillis par Alain Cochard, le 21 mai 2025
 

Programmation 2026-2027 de l’Opéra de Lille : www.opera-lille.fr/
 
Photo Barbara Eckle © Angéline Moizard

 

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