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« Un élixir d’amour » au Théâtre des Champs-Elysées – Le coup du sciroppo – Compte-rendu

Que l’on aurait aimé partager ce moment avec le jeune public auquel cet Elixir est destiné ; les rires, les chuchotements, les applaudissements, le plaisir du spectacle vivant auraient à coup sûr réchauffé le Théâtre des Champs-Elysées ouvert pour cette générale à quelques journalistes. Cette adaptation tout en finesse du célèbre opéra de Donizetti, due à Henri Tresbel, a, malgré la pandémie, fort heureusement été sauvée en prévision de la commercialisation d’un dvd produit par le théâtre en plus de sa diffusion sur la plateforme éducative de France Télévision, Lumni.fr.
 
© Vincent Pontet 

Réduite par rapport à l’originale, cette version chantée en français, sans grand orchestre, ni chœur, vive et colorée, délicatement transposée dans les années trente, est une vraie réussite. Le décor unique avec son tapis mécanique, ses rouages, son alambic fumant et son mobilier vintage empruntés aux Temps modernes et à Charlie et la chocolaterie (Aurelio Colombo), illustre parfaitement le propos : comment rendre le sirop fabriqué par l’usine moins amer, comment redonner du travail aux ouvriers et surtout comment le jeune Nemorino va pouvoir conquérir le cœur de la belle Adina, fille du propriétaire aussi attirante que lointaine ? Grâce à l’intervention de comédiens roués et facétieux les difficultés se résolvent sur un rythme joyeux et bondissant, chaque question trouvant sa réponse, l’amour triomphant comme dans les plus doux contes.

Sahy Ratia (Nemorino) et Norma Nahoun (Adina) © Vincent Pontet

Saisis en quelques traits comme dans un bande-dessinée pour mieux définir leurs travers et leurs aspirations, les personnages sont astucieusement intégrés à ce ballet frénétique réglé par le metteur en scène Manuel Renga. On aime le Nemorino aux allures délicatement funambulesques de Sahy Ratia, même si sa voix de ténor léger n’est pas toujours soyeuse ; on rit des facéties de Jean-Christophe Lanièce, l’Officier Belcore sûr de sa séduction et de son pouvoir sur la gente féminine, capable de roucouler comme un jeune premier ; on se laisse prendre par le bagout du charlatan Dulcamara, campé par l’amusant Thibault de Damas et l’on craque devant l’élégance, la fraicheur et la sureté vocale dispensées par la soprano Norma Nahoun, irrésistible. Natalie Perez et Sara Gouzy (ouvrières et invitées au mariage) accompagnent cette joyeuse compagnie et font office de chœur, le tout étant dirigé avec légèreté par le jeune Marc Leroy-Calatayud à la tête des Frivolités Parisiennes. Un bain de jouvence.

François Lesueur

Gaetano Donizetti/ Henri Tresbel : « Un élixir d’amour » - Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 30 janvier 2021 (générale de presse) ; diffusion de l’opéra sur la plateforme éducative de France Télévision, LUMNI.FR. Réalisation d’un dvd produit par le TCE d’abord à destination des écoles (fin mars) puis commercialisé par la suite.

Photo © Vincent Pontet 

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