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Tugan Sokhiev dirige La Pucelle d’Orléans de Tchaïkovski à la Philharmonie de Paris – Inoubliable – Compte-rendu

La venue en France (à Toulouse puis à Paris) de l’Orchestre et des Chœurs du Théâtre du Bolchoï constitue un événement sans nul doute facilité par la présence depuis 2014 de Tugan Sokhiev (photo) au poste de directeur musical et chef titulaire de la vénérable institution moscovite. Au menu, une version de concert de la Pucelle d’Orléans, opéra de Tchaïkovski d’après la tragédie de Schiller (créé au Mariinski en 1881) qui ne jouit pas de la notoriété de la Dame de Pique, d’Eugène Onéguine, voire de Iolanta.
 
A la fois librettiste et compositeur, Tchaïkovski brosse le portrait d’une Jeanne passionnée : une héroïne imaginée non seulement à travers le drame que l’on connaît, mais aussi celui d’une femme amoureuse de Lionel, chevalier de Bourgogne. La musique, somptueuse et flamboyante, atteint dans la scène finale sur la place de Rouen une dimension digne du grand opéra français. Impérial, d’un constant engagement, brassant la masse sonore, Tugan Sokhiev irradie par la force de sa direction, obtenant le meilleur des troupes du Bolchoï avec un relief expressif et un sens de l’équilibre admirables, sans parler des sonorités incomparables qu’il tire de son orchestre (vents mordants, cordes frémissantes avec des basses à se damner !).
 
Les solistes ont été triés sur le volet : se détache la charismatique Jeanne de la mezzo Anna Smirnova ; voix d’une puissance phénoménale qui emplit sans difficulté le vaisseau de la Philharmonie. Une incarnation inoubliable, émouvante et fascinante d’intensité dramatique. Le ténor Oleg Dolgov ne dépare pas dans le rôle très exposé du Roi Charles VII, la basse Stanislav Trofimov offre à l’Archevêque toute la richesse de son chant abyssal et Andrii Goniukov montre un Dunois tout aussi profond. Les autres personnages se hissent également sur des sommets : L’Ange de Marta Danyusevich, Agnès Sorel de Anna Nechaeva, le séduisant Lionel de Igor Golovatenko ou encore le jeune Raymond de Bogdan Volkov). Les splendides Chœurs du Bolchoï font feu de tout bois et sont un acteur à part entière du déroulement de l’action. Un moment fort de la saison 2016-2017 qui restera dans toutes les mémoires.
  
Michel Le Naour

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Tchaïkovski : La Pucelle d’Orléans (version de concert) - Paris, Philharmonie, Grande Salle Pierre Boulez, 17 mars 2017

Photo Tugan Sohkiev © Marco Borggreve

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