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Tosca à l’Opéra Bastille - La bête et la belle - Compte-rendu

On ne reviendra pas sur le spectacle honnête, un peu vide, un peu trop conventionnel de Werner Schroeter, laissé à lui-même depuis la disparition du cinéaste, d’autant qu’on allait à cette reprise appâté par la promesse d’une grande Tosca. C’est du moins comme cela que partout et par tous Martina Serafin est présentée, la Tosca du moment. Hors elle ne nous a offert qu’une honnête routine.

Un port avantageux, un grand instrument assez admirablement tenu, du style parfois et parfois non : son misérable « Vissi d’arte » très peu prié sentait son vérisme, la soprano essayant d’y racheter à coup de glotte la ligne qu’elle n’avait pas su y trouver.

Au total une honnête Tosca, plus à l’aise dans la comédie du I que dans le drame des deux autres actes, malgré un beau duo final où enfin la flamme de sa voix s’éclaire. Mais enfin on ne peut pas vraiment lui en vouloir, ses partenaires ne faisaient rien pour l’inspirer.

Belle gueule et physique avenant, Calin Bratescu à la stature de Mario Cavaradossi mais sa voix se traîne, la note est souvent prise en dessous, la forge de son souffle gonfle les appuis. C’est parfois musical, même parfois phrasé, mais beau jamais.

Enfin ce n’est rien comparé au malcanto, à la vulgarité, déployés par Sergey Murzaev (alors qu’on a à la maison Franck Ferrari…). Ce timbre qui aboie, ces mots tout secs, quelle horreur ! Et comme en plus il prend le personnage par le petit bout de la lorgnette ! Barone, certainement pas. Il n’est que stupre, et jusqu’au ridicule ; bête ivre de sexe ! Au II on a eu plus d’une fois envie de rire devant son jeu d’acteur digne du cinéma muet.

Les comprimari nous vengeaient : Nicolas Testé, Angelotti ardent et sensible, Luciano di Pasquale, Sacristain sans surcharge mais plein de vie, Simeon Esper, Spoletta vipérin qui faisait bien plus peur que son maître, Christian Tréguier dont chaque mot est si juste, chaque jeu de scène si bien vu. Et plus encore nous vengeait l’orchestre, admirable de bout en bout (Ah ! ce solo de clarinette pour « E lucevan le stelle » …) , en symbiose parfaite avec la direction élégante, sensible et vive, entièrement dédiée à la scène que composait avec grâce Paolo Carignani ; une des plus belles qu’on ait entendues dans Tosca. Et si la Grande Boutique lui confiait une fois pour toutes le répertoire italien ?

Jean-Charles Hoffelé

Puccini : Tosca - Paris, Opéra Bastille, 9 novembre ; prochaines représentations les 13, 17 et 20 novembre 2012

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Photo : Opéra national de Paris/ Julien Benhamou
 

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