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Thérèse au Festival de Radio France et Montpellier - Une admirable résurrection - Compte-rendu

Avec une version de concert de Thérèse, ouvrage en deux actes créé en 1907, le Festival de Radio France et de Montpellier 2012 apportait sa contribution à la célébration de l’anniversaire Massenet. Contribution de taille, chacun aura pu s’en rendre compte puisque la soirée était retransmise en direct sur les ondes de France Musique.
« Drame musical » : ainsi le compositeur a-t-il définit un ouvrage concis dont l’action se situe en 1792, en pleine Révolution française, et qui mêle des moments saisissants, caressés par le souffle de l’Histoire en marche, à d’autres, intimistes, où l’auteur raffine sa palette expressive (le clavecin intervient). Comme avec La Navarraise – ouvrage d’un caractère complètement différent, redécouvert à Saint-Etienne en novembre 2011 -, Massenet montre dans Thérèse son étonnante capacité de renouvellement : il fait entendre du neuf et pourtant… cette musique ne peut appartenir qu’à lui.

Montpellier a mis tous les atouts de son côté pour cette résurrection, avec d’abord l’un des plus merveilleux chefs lyriques français qui se puisse trouver. Dès l’ouverture de Démophon de Johann Christoph Vogel (1756-1788) qui tient lieu de prélude à la soirée (Thérèse ne dure pas plus de 70 minutes), Alain Altinoglu manifeste une élégance racée et obtient un fini instrumental remarquable de l’Orchestre national de Montpellier : voilà qui augure du meilleur pour la suite ! Regard d’un musicien du début du XXe siècle sur les événements de la fin XVIIIe français, la musique de Thérèse requiert un mélange de caractère et de tact qu’Altinoglu possède au plus au haut point. L’exécution en version de concert ne souligne que mieux sa capacité à donner vie au théâtre que la partition porte en elle. L’excès à certains moments se nommerait emphase, à d’autres kitch ; le chef trouve toujours le ton juste et porte ses interprètes de bout en bout.

Un ennui au ménisque contraint Nora Gubisch à demeurer assise pendant toute la soirée, mais cela n’affecte à l’évidence en rien sa prestation. Avec quelle autorité vocale et quelle finesse psychologique vit-elle les balancements, les hésitations de l’héroïne entre son mari, André, et un amour d’autrefois - mais point éteint - : Armand de Clerval. Prenante incarnation, et ce d’autant que la mezzo est on ne peut mieux entourée. Etienne Dupuis dit avec flamme l’amour de la liberté d’André, sa tolérance et son sens le l’amitié aussi, tandis que Charles Castronovo, même si le timbre manque d’un peu de variété, campe un Armand plein de noblesse, de feu aussi lorsque ses sentiments pour Thérèse se ravivent.

Les interventions de François Lis (Morel), Yves Saelens (un officier), Patrick Bolleire (un officier) et du Chœur de l’Opéra de Montpellier, bien préparé par Noëlle Gény, achèvent de conduire la résurrection de Thérèse à un plus qu’enthousiaste accueil du public. Comme pour tant d’autres résurrections lyriques intervenues dans le cadre du Festival de Montpellier, on espère que le disque se fera l’écho d’une mémorable soirée.

Alain Cochard

Massenet : Thérèse – Montpellier, Corum, Opéra Berlioz, 21 juillet 2012
(retransmis en direct sur France Musique)

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Photo : Marc Ginot
 

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