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Strasbourg - Compte-rendu - Les Joyeuses commères chez Fellini

L’Opéra National du Rhin présente, pour les fêtes de fin d’année, Falstaff de Giuseppe Verdi dans une mise en scène fort efficace de Giorgio Barberi Corsetti. Situé l’action dans les années cinquante peut à priori paraître inopportun, et pourtant force est de constaté que tout fonctionne à merveille, voilà un spectacle réjouissant, drôle et sans vulgarité. Cela virevolte, court, et tourbillonne, les portes claques dans tous les sens, du vrai théâtre de boulevard, dans le plus noble sens du terme. Les femmes mènent leur petit monde à la baguette et ces messieurs ne demandent qu’à se laisser berner.

Les décors fort beaux de Christian Taraborrelli participent efficacement à l’action. Les changements à vue fort judicieux donnent au spectacle une allure de folle journée que ni Verdi ni Shakespeare n’auraient désavouée, soutenue par une direction d’orchestre (Carlo Rizzi) fort efficace, les cordes grondent, rugissent, les cuivres tempêtent, tressautent, ricanent, et la petite harmonie pépie et cancane à l’unisson de nos joyeuses commères.

Les dames dominent le plateau, il faut dire que ce sont elles qui tirent les ficelles du drame. L’Alice de Nuccia Focile mène tout son petit monde au doigt et à l’œil secondé en cela par la très efficace Meg d Isabelle Cals. Leurs voix se marient à merveille et rivalisent d’agilité et de style. Mariana Pentcheva (Mrs. Quickly) balaye la scène de sculptural « Reverenza » tant et si bien qu’on se croirait revenu aux splendeurs de Barbieri et Simionato. La comédienne est drôle et se sert admirablement de son physique d’enjôleuse pour attirer dans ses filets un Falstaff qui ne demande qu’à se laisser séduire, et pourquoi pas ajouter une troisième conquête à son tableau.

Les Hommes ne déméritent pas devant leurs commères : en premier lieu l’époustouflant Falstaff d’Alan Opié, enfin un artiste qui à compris que le rôle demande non seulement une figure mais surtout un excellent chanteur. Toutes les notes sont respectées, et avec quel brio, on est loin de ces baryton en fin de carrière qui voulant faire comique sacrifie le chant à la parodie. Il faut le voir se pavaner et faire le paon lors de sa confrontation avec Ford.

Tommi Hakala, possède exactement la pointure du rôle de Ford, velouté du timbre et puissance, sans pour cela sacrifier une ligne de chant fort bien conduite, un grand baryton Verdi se profile à l’horizon. Son air de la jalousie aurait mérité une salve d’applaudissement. Le couple d’amoureux est fort bien distribué, dominé par le superbe Fenton d’Ismaël Jordi, voix souple et bien timbrée, et par la Nannetta de Laura Giordano. Je suis certain que bien des spectatrices auraient souhaité être à sa place. Les autres comparses sont à l’unisson de ce superbe plateau, et les chœurs, bien préparés par Michel Capperon, complètent admirablement un spectacle drôle et bien dans le contexte des fêtes de fin d’année qui se profilent à l’horizon.

Bernard Niedda

Opéra National du Rhin le 10 décembre. Autres représentations les 12, 18, 21, 23, 28 décembre à Strasbourg. Les 7 et 9 janvier à Mulhouse.

Les DVD de Falstaff

Photo: Alain KAISER
 

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