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Strasbourg - Compte-rendu - Les Boréades de Rameau dirigées par Emmanuelle Haïm

Le parti pris de Laurent Laffargue semblait des plus intéressant. Situer l’action dans le monde du cirque. Mais voilà, au fil de la représentation, on à l’impression d’assister à une succession de numéros sans aucune cohérence, et pourtant l’ultime ouvrage de Rameau suit une logique implacable : l’abandon du pouvoir en faveur d’un amour sincère et désintéressé. Dommage car faire d’Abaris un clown blanc correspondait bien à la nature du personnage.

Heureusement, c’est des voix et de l’orchestre que nous viendrons les moments de grâces. Anne Lise Sollied (Alphise) et Paul Agnew (Abaris) possèdent l’exacte tessiture de leurs rôles : voix souple et pleine de charme pour Elle, demi-teinte suaves souffle inépuisable pour Lui. Son ultime ariette (Que l’amour embellit la vie) tient la salle en suspens dans un silence qui en dit long sur l’art de ce splendide artiste. Calisis et Barilée respectivement Eric Laporte et Nicolas Cavallier jouent parfaitement leur personnage, avec un avantage vocal pour la voix ambrée et souple de Nicolas Cavallier, mais pourquoi ces claquements de fouet intempestif qui viennent plus d’une fois rompre l’harmonie de l’orchestre et soulever les rires du public a contrario d’une action qui se veut dramatique.

Nous ne parlerons pas des battements d’ailes ridicules du chœur au début du cinquième acte qui réduisent à néant les effets dramatiques de la scène de Borée : magnifique Andrew Foster Williams, voix ample et sépulcrale. Ballet sautillant et gesticulant en tous sens sans aucune grâce, un comble pour un Opéra-ballet. Le concert d’Astrée sous la direction d’Emmanuelle Haïm vient charmer nos oreilles tout au long de ces trois heures de spectacle. Articulation acérée des cordes, justesse des vents, petite harmonie qui gazouille à souhait et nous donne à entendre de merveilleuses pastorales. Admirable Chœur du Concert d’Astrée renforcé par les membres de l’Opéra National du Rhin. Un enchantement pour les oreilles, malheureusement gâché par une scénographie inadéquate.

Strasbourg le 4 juillet 2005

Bernard Niedda

Rameau en DVD

Photo: Alain Kaiser
 

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