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Spectacle Teshigawara, Brown et Kylian au Palais Garnier - So chic - Compte-rendu
Très chic, ensuite, ces cinq nymphes vêtues de gracieux plissés blancs, qui ondulent comme grisées d’elles mêmes devant des projections qui n’ont -évidemment- aucun rapport entre elles. L’œuvre, Glacial decoy, déjà donnée en 2003 à l’Opéra, est signée de la papesse du post modern art, Trisha Brown. Et le concept, car on ne dit plus « sujet », ramène aux temps expérimentaux de Robert Rauschenberg. Pas d’identité pour le fond visuel, bien que les photos aient été prises en Floride, un flux délicat mais insipide, aux airs de faux laisser-aller, et emprunté souvent à la gestique enfantine, sans le côté « bio » de la danse naïve et charmante d’une Isadora Duncan. Il s’agit là de la quête d’un mouvement qui se déroule dans « le champ du caché » dit la chorégraphe: mais ce caché l’est resté, tout au moins pour les yeux à écailles de ceux qui aiment que la danse exprime autre chose que sa propre contemplation.
Reste Jiri Kylian, dieu contemporain, dont on ne saurait critiquer le moindre frémissement d’épaule: et certes, Doux mensonges, créé pour l’Opéra en 1999, continue d’étonner par son étrangeté, d’autant que le chorégraphe a eu la bonne idée d’utiliser des polyphonies géorgiennes et des madrigaux de Gesualdo et Monteverdi pour mettre en scène deux couples. Ceux-ci se déchirent et s’enlacent avec une infinie perversité, chacun remontant d’une trappe comme des leitmotive, des obsessions, des mirages, plutôt que des êtres vivants, tandis que leurs corps filmés se projettent sur le fond de la scène et se poursuivent dans le labyrinthe des installations complexes qui se trouvent sous le plateau. Comme s’ils exploraient leur propre angoisse. Elégant et hermétique, du moins est- il convenu de le juger ainsi. Toute l’habileté de Kylian est là, de faire croire que son œuvre a un sens subtil mais qu’il vous échappe, ce qui est agaçant. On comprend néanmoins que pour les quelques danseurs engagés dans cette triple aventure (11 en tout), l’enjeu soit à leur échelle plus valorisant que de se trémousser dans Paquita ou de jouer les courtisans dans quelque superproduction néoromantique.
Jacqueline Thuilleux
Paris, Palais Garnier, 12 novembre 2013
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Photo : Agathe Poupeney / Opéra national de Paris
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