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Roméo et Juliette de Berlioz par François-Xavier Roth et Les Siècles - L’histoire à vif – Compte-rendu

Le mouvement baroque a fini par imposer la démarche historique à toute l’activité musicale. Mais elle a ce faisant creusé le fossé entre les grosses machines symphoniques ronflantes traditionnelles et la maigreur de son des « baroqueux »… C’était compter sans l’appétit des nouvelles générations qui se sont mis en tête d’appliquer ce processus historique à l’ensemble du répertoire en changeant d’instruments en fonction de l’époque des compositeurs et des œuvres. 
 
Là, on risquait fort de se heurter à de vulgaires problèmes matériels de maîtrise technique d’instruments anciens, donc de facture très différente ! Le seul à avoir relevé le défi est François-Xavier Roth avec son orchestre « Les Siècles » avec lequel il joue à saute mouton, de Berlioz à Boulez. Avec quelle impétuosité il lance le Roméo et Juliette du premier, emballant ses cordes mises à nues comme Napoléon passant le pont d’Arcole ! Ayant scrupuleusement disposé l’orchestre selon les souhaits de Berlioz, il obtient une réponse très positive de l’acoustique de la nouvelle salle : c’est à la fois chaud et clair.

Mathieu Romano © DR
 
L’ensemble vocal Aedes que dirige l’excellent Mathieu Romano est fort bien servi lui aussi dans son itinérance qui le mène de l’avant-scène au sommet du dernier balcon. Ce sont les deux amants, la mezzo Isabelle Druet et le ténor Jean-François Borras, qui semblent le plus à la peine. En Frère Laurent, la basse Jérôme Varnier tire mieux son épingle du jeu. Le triomphateur de cette Symphonie dramatique reste à juste titre l’orchestre par sa richesse de timbres. Car même si cela peut paraître paradoxal, le respect de l’histoire ne fait qu’exacerber la modernité d’une écriture qui annonce parfois Debussy.
 
Jacques Doucelin
 
Paris, Philharmonie I, 16 mars 2015

© Marco Borggreve

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