Journal

Reprise à Bastille de la Tosca mise en scène par Werner Schroeter - Tosca morte - Compte-rendu


Cette fois, Werner Schroeter ne sera pas revenu régler sa Tosca : la mort l’a pris le 12 avril de l’année dernière. Il se plaisait à ajouter lors de chaque reprise un détail, à retoucher un personnage, et contre vents et marées, aimait ce spectacle imparfait et qui le restera.

Qu’il ait concentré son vrai seul geste de théâtre dans un événement absent de l’œuvre de Puccini, ce soldat mort qui donne une action exogène à tout le début du III – chant du berger, cloches de Rome - mais surtout qu’il se soit contenté d’une lecture de pure tradition jusque dans la volonté de conformer sa direction d’acteur aux canons du seul opéra, excluant tout recours à la richesse du théâtre, a fait couler beaucoup d’encre, dont la nôtre.

Interrogé par un confrère sur le pourquoi de cette reprise – après tout la Grande Boutique aurait pu se lancer dans une nouvelle Tosca, cela paye toujours - Nicolas Joel a répondu, on imagine avec son œil qui frise, qu’elle avait le mérite d’exister.

C’est exactement cela, et Schroeter n’a pas voulu autre chose : faire un spectacle sans prétention et sans artifice supplémentaire (comme ces pouffiasses dont Luc Bondy encombre l’acte de Scarpia par exemple), qui rende clairement l’action, en costumes d’époque et avec le décorum adéquat : Mario Cavaradossi à sa toile, Scarpia sa table de banquet, Tosca son costume Maria Callas, le Te Deum sa procession.

C’est un peu court mais cela suffirait si des monstres sacrés venaient l’investir. Et Schroeter a d’ailleurs certainement pensé qu’un Scarpia, qu’une Tosca, qu’un Cavaradossi comme les voulaient Puccini feraient le spectacle.

Mais voila, ni la cantatrice très petite femme puccinienne de Iano Tamar, qui se fait la voix plus grosse que possible pour emplir Bastille, ni le Cavaradossi de Carlo Ventre, sonore mais sans ligne, qui joue grand genre mais ne décolle pas, ni même, surprise, un Frank Ferrari qui promet beaucoup avant le Te Deum mais au II est constamment bu par l’orchestre ou par la scène, bien qu’il chante tout du proscenium, n’ont dans ce lieu la carrure de leurs personnages. Gageons qu’à Garnier, il en aurait été autrement.

Péché mortel : oui, l’orchestre de Tosca est magique, mais à force de le faire écouter Renato Palombo perd le drive. C’était bien la peine que Puccini mette un tel sens du temps dramatique dans son chef-d’œuvre.

Jean-Charles Hoffelé

Puccini : Tosca – Paris, Opéra Bastille, le 8 mai, puis les 11, 14 et 18 mai 2011
www.operadeparis.fr

> Programme détaillé et réservations de l'Opéra Bastille

> Vous souhaitez répondre à l’auteur de cet article ?

> Lire les autres articles de Jean-Charles Hoffelé

Photo : DR

Partager par emailImprimer

Derniers articles