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Rafael Frühbeck de Burgos et l’Orchestre Philharmonique de Dresde - Main de fer dans un gant de velours - Compte-rendu

Le chef espagnol Rafael Frühbeck de Burgos fait, cette année, sa tournée d’adieu avec l’Orchestre Philharmonique de Dresde dont il assure la direction depuis 2004. Moins célèbre que la Staatskapelle, cette phalange qui fêtera bientôt ses 150 ans a su s’imposer dans le paysage musical de la Florence de l’Elbe. On se souvient que Michel Plasson avait présidé à ses destinées entre 1994 et 2001, parallèlement à ses fonctions toulousaines.

A 78 ans, Frühbeck de Burgos possède toujours la même vivacité et la même énergie, mais surtout une expérience de l’orchestre sans pareille. Assez contrôlé dans l’Alborada del gracioso de Ravel (la Philharmonie de Dresde n’a, à l’évidence, pas la virtuosité suffisante pour transfigurer cette pièce), le maestro veille à éviter tout débordement de la part du pianiste turc Fazil Say dans le Concerto en sol, tenu avec fermeté. Bridé dans ses élans, le soliste reste assez près de la partition de Ravel (dont il tourne d’ailleurs les pages) et ne manifeste son audace que dans un mouvement lent bien narcissique. Les bis (un extrait précipité de la Sonatine de Ravel et une adaptation jazzy, enlevée, du Summertime de Gershwin) sont accueillis avec enthousiasme par un public ravi.

Dans la Symphonie « Titan » de Mahler, la battue précise d’un chef aguerri et à l’aise dans le répertoire germanique sait se faire souple et libre. Sans éviter certaines lourdeurs (dans le final), il réussit à imprimer à l’œuvre un sens de la construction au détriment parfois des effluves d’Europe centrale (Scherzo) dont la Première Symphonie est gorgée. Pour conclure, annoncés par Frühbeck de Burgos lui-même, les Intermezzos de l’opéra Goyescas de Granados au lyrisme prenant, comme le pétillant extrait de la zarzuela Le Mariage de Luis Alonso de Giménez, apportent une note ensoleillée par l’engagement de musiciens pourtant rompus à une autre tradition. Sous l’autorité d’un tel chef, ils manifestent une jubilation rythmique contagieuse.

Michel Le Naour

Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 6 mai 2011

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Photo : DR
 

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