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Philippe Bianconi en récital à l’Athénée - Evidente simplicité - Compte-rendu

Enregistrement marquant de l’année Debussy, l’intégrale des Préludes sous les doigts de Philippe Bianconi (1) a capté au moment opportun une interprétation que le pianiste portait en lui depuis très longtemps. Invité du rituel concert parisien du Festival Piano aux Jacobins, en prélude à la 34ème édition de la manifestation toulousaine (qui se tiendra du 3 au 27 septembre), Bianconi a consacré la soirée aux Préludes et redit ses profondes affinités avec l’envoûtant mystère sonore de Claude de France, dans le cadre intimiste de l’Athénée.

Inoubliable voyage poétique que celui dans lequel ce pur musicien entraîne un auditoire littéralement happé par la beauté. Bianconi ne plaque pas une idée interprétative sur les sons, mais procède par ce que l’on pourrait qualifier de déduction poétique. Il ne traduit pas ; il révèle. Sa maîtrise parfaite du texte, sa fidélité à l’une des musiques les plus libres et les plus précisément écrites qui soient vont de pair avec une idéale simplicité. « Quatre croches seront toujours quatre croches », disait Debussy à Marguerite Long. Nul flou, nulle facilité « impressionniste », « atmosphérique » ; magistrale leçon de pédalisation… Bianconi saisit – mais ne force jamais - le caractère des vingt-quatre pièces tout en donnant une unité à chacun des deux Livres. Quel art des transitions ; ici un quasi-enchaînement, là un silence savamment dosé… Infinie, la palette de couleurs s’accorde à chaque morceau, jusqu’au Feux d’artifice conclusifs. On est tenté de mettre l’accent sur la solitude qui hante Des pas sur la neige, la saisissante apparition de la Cathédrale engloutie, l’espiègle légèreté de La danse de Puck, l’impalpable vapeur sonore des Brouillards ou l’étrangeté de Canope, mais c’est avant tout la cohérence d’une somme poétique et le tact avec lequel Bianconi lui donne vie qu’il importe de saluer.

En bis, L’Isle joyeuse, lumineuse, jubilatoire, libre comme les embruns, précède D’un cahier d’esquisses. Une conclusion tout à la fois sensible, pudique et poétique, à l’image d’un de nos plus grands pianistes.

Alain Cochard

(1) 1 CD La Dolce Volta/ dist. Harmonia Mundi

Paris, Athénée Théâtre-Louis Jouvet, 18 mars 2013

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Photo : DR
 

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