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Paris - Compte-rendu : Stephen Hough à l’Auditorium du Louvre, superbe hommage à Mozart !

Tous ceux qui ont déjà entendu le pianiste anglais Stephen Hough savent quel virtuose et quel musicien il est. Certes original. Parfois décevant au disque. Mais du bois dont on fait les plus grands interprètes. C’est ce qu’il a prouvé lors de son dernier récital à l’Auditorium du Louvre. Il avait conçu la soirée comme un hommage à Mozart. Il aurait pu, comme tant d’autres, se contenter d’enchaîner des pièces archi-connues de Wolfgang Amadeus.

En ouverture, il choisit sa Fantaisie en ut mineur qu’on associe souvent à la Sonate de même tonalité dédiée à son élève Mme von Trattner. Il ajoutera après l’entracte une magnifique Sonate en si bémol, d’un tout autre caractère, à la fois brillante et profonde, avant de donner en bis la Fantaisie en ré mineur. Avec ces deux Fantaisies, Hough a voulu rappeler ce qu’on a tendance à oublier aujourd’hui, à savoir que Mozart fut un compositeur « contemporain » et dur aux oreilles de ses premiers auditeurs.

L’Empereur Joseph II voyait juste lorsqu’il fit ce commentaire après la chute de Don Giovanni à Vienne : « cette musique est trop riche pour mes lourdauds de Viennois ! » Un prince sans illusions sur ses sujets, mais bigrement perspicace quant au génie de son compositeur officiel ! Pour les besoins de sa démonstration, Hough joua un de ses morceaux fétiche, les Ghost Variations de l’Américain né en 1951 George Tsontakis. Comme Beethoven après lui, Mozart sacrifia beaucoup à l’art de la variation : confrontation éclairante avec la musique d’aujourd’hui. Hough s’y met lui-même en signant Trois Transformations de Mozart où il mêle l’humour de Poulenc notamment dans L’Appel du printemps, à la fois lied et finale de l’ultime Concerto pour piano de Mozart.

La fin est brillantissime avec un bouquet déclenché par deux artificiers géniaux, Liszt et Busoni, deux immenses pianistes devant l’Eternel, auxquels l’Anglais n’a rien à envier mêlant humour et virtuosité transcendante dans leur Figaro Fantasy nourrie du Non piu andrai farfallone de Figaro et du Voi, che sapete de Chérubin. Mozart aurait adoré. Nous aussi.

Jacques Doucelin

Auditorium du Louvre, le 8 février 2006

Photo : DR
 

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