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Paris - Compte-rendu : Piano : question de nature

Non, tout le monde ne joue pas du piano de la même façon ! Et c’est heureux. A deux soirs d’intervalle, sur des instruments de même marque, deux pianistes de générations différentes ont donné des visions opposées, mais parfaitement respectables de la musique. A 65 ans, le Yougoslave Stephen Kovacevitch était l’invité de Piano quatre étoiles salle Gaveau (27 mars) pour un programme illustrant les deux écoles de Vienne, tandis que le Norvégien de 36 ans Leif Ove Andsnes (photo ci-dessus) présentait un programme romantique pour Jeanine Roze au Théâtre des Champs-Elysées (28 mars).


Le premier fait un peu de chichi dans la Sonate K.282 de Mozart et un peu brouillon dans l’Opus 10 n°1 de Beethoven. Il se rattrape magnifiquement dans une Sonate de Berg aux couleurs debussystes et d’un lyrisme constant : elle a Brahms et Schubert pour ancêtres. D’ailleurs, Kovacevitch va clore la soirée avec la grande Sonate en la majeur D. 959 de ce dernier d’une incroyable poésie. Sa désespérance est moirée d’une discrète sensualité : la vie s’affirme devant l’urgence de la mort.


Le jeune homme du Nord s’attaque à la sœur de cette sonate de Schubert, celle en ut mineur D. 958. Un Schubert exsangue, distancié, manquant de soleil. Il y a du Ingmar Bergman chez ce pianiste du clair obscur et du noir et blanc. On souhaiterait une articulation plus franche dans les mouvements lents, une plongée plus directe dans le drame. Qu’il écoute Richter, Kempff ou Arrau : la jeunesse à le droit et le devoir d’impatience ! Le Beethoven plus intellectuel des dernières sonates lui va mieux : Andsnes gagne la bataille avec la trente et unième en la bémol majeur. Musique et technique sont au rendez-vous.


Jacques Doucelin


Réservez vos places pour la Salle Gaveau et le Théâtre des Champs-Elysées

Photo:DR

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