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Paris - Compte-rendu - Palais Garnier : Angela Denoke en récital au Palais Garnier - De Babelsberg à Hollywood


Convoquer Marlene Dietrich, Zarah Leander, Weill, Hollaender ou Kreuder sous les ors du Palais Garnier, voilà encore une idée cocasse à laquelle Gérard Mortier n’a pas su résister. En guise d’adieu à Paris, le futur directeur de l’Opéra de Madrid a conçu pour l’une de ses interprètes préférées, la soprano Angela Denoke, un bien joli programme de chansons célèbres, intitulé « De Babelsberg à Hollywood », en référence aux deux plus grands studios de cinéma des années trente.

Un piano, deux confortables fauteuils, une table basse, un saxophone, une contrebasse et une batterie pour créer une atmosphère cosy et un fil rouge, celui du parcours artistique et politique de deux comédiennes-chanteuses de renom, Marlene Dietrich, l’allemande fuyant la montée du nazisme pour l’Amérique et Zarah Leander, la suédoise garante de la race nordique sur les écrans allemands. Ce récital alertement présenté par Gérard Mortier, frétillant comme un gardon, pouvait surprendre dans un lieu chargé d’histoire et de musique, mais la qualité des interprètes a bien vite dissipé toutes les inquiétudes.

Transformée par cet exercice inédit pour elle, Angela Denoke s’est formidablement acquittée de cette tâche nouvelle, trouvant pour chaque morceau le ton, le style, le chic, sans chercher à imiter, avec cette indispensable touche de mélancolie teintée d’espoir, contenues dans ces mélodies signées Peter Kreuder, Theo Mackeben, ou Werner Richard Heymann. Sa voix ondoyante, plus basse que de coutume et moins sollicitée qu’à l’opéra, mise en valeur par le micro a fait mouche en allemand comme en anglais, magnifiquement accompagnée par le piano feutré de Tal Bashai, le saxophone endiablé de Norbert Nagel, la contrebasse volubile de Jan Roder et les ébouriffantes percussions de Michael Griener, toujours prompts à d’irrésistibles improvisations.

Cole Porter, George Gershwin et le célèbre « Ich werde jede Nacht von Ihnen traümen » (en réalité un duo issu de l’opérette de Karl Millöcker, Gasparone, filmée en 1937 par Georg Jacoby et chanté par Johannes Heersters et Edith Schollwer) concluaient très agréablement ce rendez-vous que l’on aimerait voir renouvelé.






François Lesueur



Paris, Palais Garnier, 28 juin 2009



Photo : DR

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