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Paris - Compte-rendu - Maurizio Pollini l’alchimiste


Maurizio Pollini n’est jamais plus convaincant que lorsqu’il aborde la musique contemporaine. Salle Pleyel, pour cette deuxième station qui entre dans la perspective globale d’une série de neuf concerts, il assure seul ou avec d’autres interprètes la maîtrise d’œuvre du projet. L’accent est mis présentement sur la continuité de langage entre l’un des grands maîtres post-romantiques allemands Johannes Brahms et ses descendants au XXe siècle : Arnold Schoenberg et Karlheinz Stockhausen. Dans les Klavierstücke VII, VIII et IX pour piano seul qui ouvrent le concert, l’exécution de Pollini atteint un véritable accomplissement : chaque intention est mise en relief dans le domaine de la résonance, du dosage des timbres, de la précision, de l’usage de la pédale (en particulier dans l’obsessionnel Klavierstücke IX). A l’heure actuelle, Pollini semble être le seul à exercer un tel contrôle physique et intellectuel sur l’exécution de ces œuvres fondatrices du clavier de notre temps.

Le compositeur hongrois Peter Eötvös à la tête du Klangforum de Vienne, ensemble à géométrie variable, propose ensuite trois œuvres représentatives de la première période de Stockhausen : le farouche Kreuzpiel (1952) pour piano, hautbois, clarinette basse et percussion ainsi que le savoureux et fruité Zeitmasze (1956) pour instruments à vent et le webernien Kontrapunkte (1953). La perfection atteinte témoigne de la familiarité entretenue par le chef et ses musiciens à l’égard de cette musique jadis expérimentale.
En seconde partie, les Trois pièces de l’opus 11 de Schoenberg prennent, sous les doigts de Pollini, un caractère d’évidence par le lyrisme d’une interprétation où la concentration le dispute à l’engagement et surtout à la poésie. Avec le Quintette pour piano et cordes opus 34 de Brahms, le programme revient sur des terres plus rebattues : le Quatuor Hagen y témoigne d’une chaleur qu’on ne lui connaît pas toujours et sous l’impulsion d’un pianiste là encore attentif à tous les paramètres, la partition est servie avec un rare niveau d’excellence. Un tel concert si abouti laisse présager pour la suite de ce « Pollini Perspectives » des lendemains enchanteurs.

Michel Le Naour

Paris, Salle Pleyel, 7 mars 2009

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Photo : DR

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