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« The New Gustav Leonhardt Edition » (35 CD Warner Classics) / Le Disque de la Semaine – Hommage à un grand serviteur de la Musique – Compte-rendu

Dix ans après la disparition de Gustav Leonhardt (1928-2012), Warner Classics publie un coffret de 35 CD ; un témoignage précieux de la foisonnante activité discographique d’un artiste qui préférait pourtant, et de loin, les concerts. Bien que donnant une centaine de récitals chaque année, Gustav Leonhardt trouvait encore le temps d’enregistrer : jusqu’à cinq disques par an entre 1962 et 1997. 200 albums au total parsèment sa carrière ! Le légendaire musicien néerlandais a enregistré pour de très nombreux labels (Vanguard, Teldec, SEON, Deutsche Harmonia Mundi, EMI, Philips, Virgin, Sony, Alpha, EMR).
Rameau : Tambourins I et II - 3e Concert des Pièces de clavecin en concert (ext.) - Frans Brüggen, Sigiswald Kuijken, Wieland Kuijken et Gustav Leonhardt)

Warner Classics nous convie à un grand voyage en sa compagnie, seul ou entouré d’artistes qui ont beaucoup compté pour lui : son épouse, la si précieuse violoniste Marie Leonhardt, le flûtiste Frans Brüggen, le violoniste Jaap Schröder, le violoncelliste Anner Bylsma ou les frères Kuijken.
Pionnier et maître du renouveau baroque, Gustav Leonhardt aimait à se présenter comme un serviteur de la musique. Un très grand serviteur particulièrement actif et d’un grand éclectisme. Son amour indéfectible pour Jean-Sébastien Bach (16 CD en témoignent dans ce coffret) ne saurait faire oublier les autres compositeurs qui figurent en bonne place dans ce florilège : Purcell (pour lui une musique « surprenante et merveilleuse »), Monteverdi, Rameau, Byrd, Böhm, Scarlatti, Frescobaldi, Froberger, Kuhnau, Couperin, Carl Philipp Emanuel Bach et bien d’autres.
 

© Franco Origlia
 
Purcell : Pavan en sol mineur Z 752 - Leonhardt Consort (ext.)

Au clavecin, à l’orgue, au clavicorde ; comme chef d’orchestre aussi, même si la direction restait secondaire. « Cela a toujours été un à-côté : je n'ai pas de chœur, pas d'orchestre, pas de baguette ! Je dirige seulement lorsque des ensembles me le demandent. Ils sont si gentils de m’inviter ». L’artiste, comme l’homme était un savant mélange d’élégance, de probité et de rigueur. Rigoureux avec lui-même, il confessait avoir beaucoup appris en écoutant Alfred Deller. Pour le contre-ténor anglais, la diction était en effet plus importante que la beauté de sa voix. C’est Deller qui lui avait appris l’éloquence au clavecin et à l’orgue. « Mon meilleur professeur, mais il l’ignorait ».
 

 
Bach : Concerto pour deux claviers, BWV 1061 (ext.) - Gustav Leonhardt, Bob van Asperen, Melante Amsterdam

Comme le souligne la belle plume Gaëtan Naulleau dans le livret, ce coffret nous offre « outre les réussites cent fois fêtées et les opus à réévaluer, des réalisations moins accomplies mais révélatrices ». Invité par Jacques Drillon à donner son avis sur Herbert Karajan, Gustav Leonhardt avait répondu avec malice que le chef d’orchestre autrichien avait « fait carrière en montrant son dos ». Aujourd’hui, dix ans exactement après sa disparition, Gustav Leonhardt se présente face à nous. Grâce à ce coffret, il est debout, tel un géant bien vivant et son aura est intacte.
 
Thierry Geffrotin

25/02/2022

A tous les passionnés de l'art de Gustav Leonhardt, on ne peut que recommander la consultation du très riche site consacré à l'artiste : leonhardt-archive.com/

« The New Gustav Leonhardt Edition » - Warner Classics (35 CD)

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