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Nancy - Compte-rendu : Wiener Blut, un feu d’artifice vocal

Vienne année zéro, l’Autriche pose sur elle-même un regard quelque peu distancié. On y voit des bourgeois lâches, opportunistes, d’autres sympathiques comme Josef, des couples désassortis tel celui de Gabriele et du comte, symbole d’un mariage sans amour mais aussi de l’alliance entre deux cultures, l’autrichienne représentée par Gabriele et l’allemande incarnée par le comte, tel est le propos de Jean-Claude Berutti.

Quelques trouvailles intéressantes vont émailler sa mise en scène vive et alerte - la villa réquisitionnée de Gabriele Zedlau, le bal chez Bitowski (lieu de rendez-vous des libérateurs) - qui tout au long des deux premiers actes pétille comme du champagne. Mais diable !, pourquoi faut-il nous donner à voir un troisième acte qui plombe un spectacle fort bien conduit jusque là ? Le public est-il si stupide qu’il ne peut comprendre un point de vue, fort estimable par ailleurs, sans qu’il soit nécessaire de nous asséner ces drapeaux nazis, et surtout ce final en deux parties, où tous les protagonistes tombent à terre, après un coup de pistolet du comte Bitowski ? Allongés, ils chantent la valse Wiener Blut, se relèvent après l’intervention de Josef déclarant « que nous sommes dans une opérette et que cela doit se terminer joyeusement », pour enfin nous donner un final digne de ce nom.

L’intérêt de cette reprise du chef-d’œuvre posthume de Johan Strauss fils réside heureusement ailleurs. Claude Schnitzler, en grand habitué de la scène lyrique, donne à l’Orchestre Symphonique et Lyrique de Nancy des couleurs sucrées où les cordes tissent un tapis soyeux. La petite harmonie excelle dans la légèreté, les cuivres se parent de couleurs sombres donnent des reflets moirés à une formation qui, à l’unisson d’une distribution d’une rare élégance, joue dans le plus pur style viennois.

La direction de l’Opéra National de Lorraine a su réunir un plateau digne des grandes heures de l’Opéra de Vienne. Le couple formé par Edwig Fassbender (Gabriele Zedlau), timbre de miel, au bien dire et au style irréprochable, et Ferdinand von Bothner (Comte Zedlau), voix souple à la ligne de chant d’une grande élégance, est un pur bonheur pour les yeux et les oreilles. Peter Edelmann (Premier Ministre), fils de la basse Otto Edelmann, comédien hors pair et timbre de velours paré de somptueuses couleurs, forme avec l’excellente Nicola Beller Carbone (Franzi Cagliari), voix fruitée et aigus tranchants, le pendant idéal du comte et de la comtesse.

Wolfgang Ablinger-Spernacker (Josef) et Henrike Jacob (Pepi Pleininger) possèdent l’abattage et la ductilité vocale idoines. Till Fechner (Kagler), comme toujours parfait musicien et excellent diseur, vient compléter une distribution excellente en tous points. Un spectacle qui, une fois n’est pas coutume en France, sait traiter l’Opérette en grande dame.

Bernard Niedda.

Wiener Blut de J. Strauss fils. Opéra de Nancy et de Lorraine, 23 octobre 2007.

Programme de l’Opéra de Nancy et de Lorraine
 

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