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​Marta Gardolinska dirige l’Orchestre de Chambre de Paris – Timbres en éveil – Compte-rendu

Outre celle d’une partition magnifique et méconnue de Zemlinski, la remarquable production de Görge le rêveur vue à Nancy et à Dijon en octobre aura aussi permis la découverte de Marta Gardolińska (née en 1988) – Vincent Borel a souligné dans nos colonnes le talent peu ordinaire d’une artiste formée à Varsovie, sa ville natale, puis à Vienne. (1) La jeune cheffe polonaise était de passage il y a peu à Paris pour un déjeuner-concert avec l’Orchestre de Chambre de Paris (OCP) destiné à une retransmission en direct (Facebook Live) On a eu le privilège de se glisser dans la salle déserte du Châtelet pour goûter aux débuts, d’un genre un peu particulier, de M. Gardolińska avec la formation parisienne.

Dreamtime pour flûte et orchestre de Philippe Hersant ouvre le programme ; un retour aux sources pour cette admirable pièce concertante créée en janvier 2014 par Emmanuel Pahud et l’OCP sous la conduite de Thomas Zehetmair. D’un seul tenant, l’ouvrage s’inspire des mythes aborigènes australiens que le compositeur français a découverts par l’intermédiaire du  Chant des pistes de Bruce Chatwin. Dreamtine est cette fois défendu – avec quel art ! – par Marina Chamot-Leguay, flûte solo de l’Orchestre de Chambre de Paris.
 

Marina Chamot-Leguay © Ugo Ponte - Onl

Très actif sur le plan discographique depuis la rentrée – il sort tout juste de l’enregistrement des mélodies avec orchestre de Jules Massenet sous la direction d’Hervé Niquet, avec les voix de Cyrille Dubois, Etienne Dupuis, Jodie Devos et Nicole Car ; une initiative du Palazzetto Bru Zane –, l’OCP se montre en très belle forme sous la baguette de M. Gardolińska. Par-delà la souplesse et la précision de sa battue, qualités qui s’illustreront d’un bout à l’autre du concert, son sens des couleurs, son aptitude à éveiller les timbres frappent immédiatement l’oreille. On ne saurait imaginer meilleure compagnie pour une flûtiste tour à tour volubile et poète que cet orchestre bruissant et plein de relief : la complicité de M. Chamot-Leguay et de la cheffe se traduit de manière intensément narrative et évocatrice.

Le nom de Fauré est connu de tous, mais ses délicieux Masques et Bergamasques op. 112 n’encombrent pas les programmes. Joyeuse, enlevée avec style par un orchestre aux pieds légers, l’Ouverture donne le ton d’une interprétation pleine d’esprit et de tendresse. On savoure tout autant ce je-ne-sais-quoi de goguenard que les vents apportent au Menuet, l’élan et le rebond la Gavotte et, enfin, la rêveuse souplesse et les coloris délicats de la Pastorale. Ce Fauré porte la signature d’une interprète de grande classe, d’évidence particulièrement à son aise dans le répertoire français.

Avis aux mélomanes toulousains et lorrains : Marta Gardolińska fera ses débuts à l’Orchestre du Capitole de Toulouse le 23 janvier dans Haydn (Symphonie n° 8) et Mendelssohn (Symphonie «  Ecossaise ») et retrouvera l’Orchestre de l’Opéra de Lorraine à Nancy les 4 et 5 février pour des ouvrages de Bacewicz (Pensieri nottturni), Rachmaninov (la Rhapsodie Paganini avec Vadym Kholodenko) et Tchaïkovski (Symphonie n° 4).

Alain Cochard

Paris, théâtre du Châtelet, 26 novembre 2020
 

 
 (1) Lire le CR : www.concertclassic.com/article/gorge-le-reveur-de-zemlinsky-lopera-de-nancy-opera-magique-compte-rendu

Plus d'infos sur : martagardolinska.com/
 
Photo © © Bartek Barczyk

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