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L’Orchestre National joue les 9 Symphonies de Beethoven au TCE - 3 questions à Daniele Gatti, directeur musical

Après une intégrale Mahler sur deux saisons au Théâtre du Châtelet, Daniele Gatti dirige au mois de novembre cinq concerts au TCE autour des neuf Symphonies de Beethoven, précédés de cinq commandes à des compositeurs d’aujourd’hui. Le chef italien s’exprime sur ses choix :

Pourquoi cette nouvelle intégrale des Symphonies de Beethoven ?

Daniele Gatti : Je sais que Kurt Masur avait déjà consacré, en 2002 et 2008, deux intégrales aux Symphonies de Beethoven avec l’Orchestre National. Ces œuvres qui constituent l’alpha et l’oméga du monde de la symphonie n’ont jamais fini d’interroger par leur richesse novatrice. J’ai souvent dirigé ces partitions séparément et donné la totalité du cycle en 2004 au Théâtre de Bologne dans un ordre non chronologique. Pour ces concerts au Théâtre des Champs-Elysées, j’ai envisagé de les jouer de manière à provoquer un sentiment de tension, les éclairant par des créations - des commandes de Radio France. Le concert d’ouverture mettra en regard la Première ainsi que la Septième Symphonie avec Protonic Games de Fabien Waksman ; puis la Seconde et la « Pastorale » avec le poème symphonique de Bechara El-Khoury intitulé Espaces-Fragmentations. Les Symphonies nos 4 et 5 seront confrontées à Flammensschritt (Lettres de feu) d’après Goethe, une pièce de Guillaume Connesson ; la Symphonie n°8 et l’ « Héroïque » avec La Bataille de San Romano de Pascal Zavaro. Le cycle s’achèvera le 15 novembre avec la Neuvième précédée d’un extrait de la Cantate n°3 de Bruno Mantovani. Cette juxtaposition hardie permet de mesurer combien Beethoven exerce toujours sur nos contemporains la même fascination au-delà des siècles.

Quelle conception avez-vous de ces œuvres ?

D. G. : Je me sers de l’édition Urtext qui, sur le plan philologique, respecte la force d’expression du compositeur et la puissance de sa vision orchestrale. Mon parcours s’inscrit dans la tradition des chefs latins, celle de Victor de Sabata, Arturo Toscanini ou Carlo-Maria Giulini. J’attache donc du prix au lyrisme, et c’est sans doute la raison pour laquelle ma symphonie préférée est la « Pastorale » qui présente beaucoup plus de difficultés d’interprétation que les autres. J’ai aussi une prédilection pour l’ « Héroïque » que j’aime inscrire à mes programmes. Les deux premières symphonies sont encore marquées par l’Ecole de Mannheim, et la différence jaillit à partir de l’ « Héroïque », véritable révolution copernicienne.

Ma conception est celle d’un Beethoven plus tendre avec une profondeur d’âme, un humanisme et une dimension spirituelle où le courage l’emporte sur les affrontements dialectiques pourtant si prégnants. L’acoustique du Théâtre des Champs-Elysées n’est pas sans poser de problèmes, et à l’inverse de l’Orchestre de Paris, nous n’avons pas de salle pour répéter, ce qui est très dommageable. Les grands orchestres internationaux sont tous en résidence dans un même lieu, ce qui est la condition sine qua non à l’obtention d’un son idéal. Je pense en particulier aux Philharmonies de Vienne, de Berlin ou au Concertgebouw d’Amsterdam.

Depuis l’an dernier, j’ai expérimenté une disposition de l’Orchestre où les contrebasses sont placées à l’arrière, les cuivres sur le côté, les premiers et seconds violons en vis-à-vis. C’est une manière d’obtenir un meilleur équilibre et faire en sorte que les musiciens puissent s’entendre davantage. Cette nouvelle répartition dans l’espace est celle que l’on impose aussi aux chefs invités. Pour l’interprétation des symphonies de Beethoven, cette configuration permet de gagner en générosité de son, en chaleur et d’aérer les échanges au sein de l’Orchestre.

Outre cette actualité, quels sont vos projets ?

D. G. : Cette saison je continuerai à programmer de la musique française. Un disque va prochainement paraître avec le National célébrant le centenaire du Théâtre des Champs-Elysées où figurera un enregistrement du Sacre du Printemps. Sinon, avec mon orchestre, je donnerai, en mai 2013, la Petite Messe solennelle de Rossini qui vit le jour à Passy à quelques encablures du Théâtre des Champs-Elysées, puis en juin, je dirigerai le Requiem de Verdi et poursuivrai ma collaboration entreprise en 2010 avec le Festival de Salzbourg. L’été prochain, ce sera pour Les Maîtres chanteurs de Wagner.

Propos recueillis par Michel Le Naour le 12 septembre 2012

Intégrale des 9 Symphonies de Beethoven
Orchestre National de France, dir. Daniele Gatti
1er, 5, 8, 12 et 15 novembre 2012 – 20h
Paris – Théâtre des Champs-Elysées

> Tarifs préférentiels au Théâtre des Champs-Elysées

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Photo : DR
 

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