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« Les Voyages de Don Quichotte » à Bordeaux – Un essai à transformer – Compte-rendu
Mise en bouche ludique à l’Auditorium avec un extrait de L’Homme de la Mancha - comédie musicale américaine immortalisée dans sa version française par à Jacques Brel - chanté par Anna Bonitatibus accompagnée à la guitare par François Chappey, suivi du cycle des trois mélodies Don Quichotte à Dulcinée de Ravel où se distingue tout particulièrement Alexandre Duhamel (Chanson à boire). Dans le Don Quichotte de Richard Strauss, Paul Daniel, directeur musical de l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine, tire le meilleur de ses troupes par sa conception fouillée, claire et narrative. Il laisse s’exprimer dans sa plénitude le violoncelle solo de l’orchestre, Alexis Descharmes, intense, expressif et chambriste, en particulier lors du dialogue avec l’alto mordoré de Nicolas Mouret. On s’interroge en revanche sur la nécessité de projeter dans la continuité, sur grand écran, une vidéo des paysages de la Mancha au détriment de la puissance évocatrice de la musique.
L’entracte joue la carte festive sous la forme d’une déambulation équestre pittoresque - Don Quichotte et Sancho Pança obligent - le long du Cours de l’Intendance. Un tel déploiement de moyens paraît en définitive superfétatoire et le résultat assez proche d’un spectacle de patronage.
Au Grand Théâtre, le jeune chef Pierre Dumoussaud (assistant de Paul Daniel) réussit avec bonheur à extraire toute la vigueur rythmique et les couleurs vives des Tréteaux de Maître Pierre de Manuel de Falla à la tête d’un effectif de dix-huit musiciens.
Marc Minkowski fait ensuite preuve d’enthousiasme et de dynamisme dans la conduite des actes IV et V de la comédie héroïque Don Quichotte de Massenet. L’énergie déployée impressionne mais ne rend pas toujours justice à la légèreté d’écriture du compositeur français. Une version de concert qui convoque ballet (chorégraphie assez superficielle de Blanca Li) et chœur - en petite forme. Admirable prestation d’Alexandre Duhamel dans le rôle de Sancho, humain et généreux, servi par des moyens superlatifs. Face à lui, le Don Quichotte de Andrew Foster-Williams à la diction impeccable se montre moins engagé et la Dulcinée de Anna Bonitatibus vocalement instable.
On aura retenu, au terme de ce donquichottesque parcours de plus de trois heures, la densité des ressources offertes par les institutions musicales bordelaises. Après ce coup d’essai, il reste à Marc Minkowski à apporter la preuve que cette ouverture en grande pompe n’est pas un leurre.
Michel Le Naour
Bordeaux, Auditorium et Grand Théâtre, 18 septembre ; jusqu'au 25 septembre 2016 / www.opera-bordeaux.com/opera-les-voyages-de-don-quichotte-2440
Photo © Fredéric Desmesure
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