Journal

L’Equivoco stravagante de Rossini à l’Opéra royal de Wallonie - Pétulant ! - Compte-rendu

Le directeur de l’Opéra royal de Liège Wallonie, Stefano Mazzonis di Pralafera, a eu l’excellente idée de monter L’Equivoco stravagante de Rossini (1811), œuvre d’un compositeur de dix-neuf ans en quête de reconnaissance. Composé pour le Théâtre del Corso de Bologne, cet opéra-bouffe en deux actes ne rencontra pas le succès escompté. Sans doute le sujet scabreux - la castration - choqua-t-il les censeurs de l’époque qui firent interdire la pièce après trois représentations. Rossini en tira pourtant de substantifiques avantages avec la commande de La Pietra del Paragone (1812) pour la Scala de Milan.

L’argument, qui tient à sa manière du Bourgeois gentilhomme et des Précieuses ridicules, est l’histoire d’un père, Gamberotto, nouvellement anobli, qui veut marier sa fille, savante piquée de littérature, à Buralicchio, un prétendant riche et sot. Ernestina est en fait aimée de son professeur de philosophie Ermanno, pauvre, transi et éconduit par la famille.
Par un stratagème de travestissement, le valet Frontino fait croire à Buralicchio que sa promise est un homme castré déguisé pour échapper au service militaire. S’ensuit une série d’événements plus cocasses les uns que les autres, s’achevant dans la joie par le mariage d’Ernestina et d’Ermanno.

Les décors de Jean-Guy Lecat placent l’action dans les années 20-30, entre piscine hollywoodienne côté cour, et salon viennois côté jardin. Tonique, la mise en scène de Stefano Mazzonis di Pralafera permet à chaque personnage d’accomplir des prodiges d’esprit, de vivacité et d’humour - y compris le chien Fiasko et ses hilarantes roulandes !
L’Ernestina de la jeune Sabina Willeit crève l’écran et dispose de moyens vocaux brillants et virtuoses qui s’épanouiront certainement dans des rôles plus substantiels.
Son prétendant, Ermanno incarné par Daniele Zanfardino, est un véritable ténor rossinien au style juste, à l’intonation claire malgré des aigus quelque peu tendus.
Grande cohérence des autres rôles : la basse-bouffe Enrico Marabelli en Gamberotto, le Buralicchio de Laurent Kubla, promis éconduit surjouant la bêtise, la fine Rosalia de la mezzo-soprano Julie Bailly et le Frontino astucieux de Daniele Maniscalchi en domestiques tirant les ficelles.

La musique de Rossini se cherche encore mais annonce les œuvres à venir par son dynamisme et sa pétulance. Dès l’ouverture, on est frappé par les similitudes avec Le Barbier de Séville et bien des morceaux d’ensemble seront recyclés par la suite. Sérieuse, méticuleuse, sans fantaisie, la direction du chef néerlandais Jan Schultsz est le seul point faible de cette représentation, d’autant que l’Orchestre et les Chœurs de l’Opéra Royal de Wallonie font montre de justesse et d’homogénéité tout au long d’un spectacle débordant de vie et de couleurs.

Michel Le Naour

Rossini : L’Equivoco stravagante
Liège, Palais Opéra, 24 février 2012, dernière réprésentation le 28 février
(retransmission en direct sur : www.dailymotion.com/operaliege)

> Vous souhaitez répondre à l’auteur de cet article ?

> Lire les autres articles de Michel Le Naour

Photo : Jacky Croisier
 

Partager par emailImprimer

Derniers articles