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Le Messie selon Deborah Warner à l’Opéra de Lyon - Messiah today - Compte-rendu

Deborah Warner aime porter au théâtre des œuvres qui ne lui sont pas initialement destinées. Au long des années elle s’est constituée une petite bibliothèque : on se souvient de sa Saint Matthieu, de son Journal d’un disparu, et d’ailleurs elle avait déjà transcrit en scène Le Messie en 2009 pour l’English Opera Group.

Sur la scène de l’Opéra de Lyon, la troupe est mobile, petit chœur, figurants comptés, l’œuvre se débarrasse des ensembles monumentaux qui l’ont engoncée durant les ères victoriennes et edwardiennes, et la fosse elle-même, subtilement animée par Laurence Cummings, fait l’orchestre mince, historiquement informé. On admire sans frein la versatilité des instrumentistes lyonnais qui fondent leurs technique et leurs instruments dans un style définitivement baroque lorsqu’il le faut : leur travail sur les opéras de Mozart se parachève en quelque sorte ici. En accord avec la scène, le chef dirige vite et léger, évacue la pompe, privilégie l’émotion. Cela ne va pas sans une certaine rationalisation du discours, un relatif manque d’arrière-plans et même parfois une absence d’émotion qu’heureusement la scène pallie.

Deborah Warner nous fait Le Messie aujourd’hui, du lit floral de l’annonciation au lit terrible de l’hôpital pour l’agonie : « I know that my Redeemer liveth » aura rarement été aussi émouvant. La simplicité de son geste, l’évidence qui soudain s’empare de l’œuvre nous la fait pour ainsi dire nôtre en projetant par-dessus la parabole christique notre propre existence. Pourtant rien n’en devient jamais banal, le sens du sacré lui-même n’est pas évacué jusque dans ses réductions parfois délicieuses comme cette crèche de la nativité campée par des bambins pétulants que les parents assaillent de leurs smartphones, et les citations picturales y veillent d’ailleurs tout au long de la soirée. On en ressort assez bouleversé.

Le quatuor excelle presque totalement, du soprano fruité de Sophie Bevan à la basse sonore, svelte, d’Andrew Foster-Williams en passant par la poésie plus élégante qu’expressive d’Andrew Kennedy dont on a connu le ténor plus mordant. Seul bémol, Catherine Wyne-Rogers dont le mezzo à la trame montre une voix épuisée… ; mais nous étions à la dernière représentation, ceci expliquant peut-être cela.

Jean-Charles Hoffelé

Haendel : Le Messie - Lyon, Opéra, 14 décembre 2012.
www.opera-lyon.com

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Photo : © Stofleth
 

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