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Le Comte Ory de Rossini à l’Opéra-Comique – Une pétillante sobriété – Compte-rendu

Comme elle s’était ouverte, au Châtelet, avec Fantasio d’Offenbach, la saison 2017 de l’Opéra-Comique se termine, en beauté, avec le Comte Ory. L’ouvrage donne l’occasion à  Louis Langrée et Denis Podalydès de se retrouver, huit ans après leur Fortunio de Messager.
1828 : Rossini termine son avant-dernier opéra, deux avant la prise d’Alger par les troupes françaises. Exit le Moyen Âge et la Terre Sainte ! Comme le laisse entendre la projection de quelques illustrations d’époque pendant l’ouverture, c’est non pas la croisade mais le début de l’aventure coloniale sur l’autre rive de la Méditerranée qui occupe ici les châtelains.

Le choix de Denis Podalydès (Eric Ruf est à ses côtés  pour les décors ; un bric-à-brac d’église pour le I avec confessionnal, chaire, armoires, statues, crucifix, etc, une austère salle de couvent au II ) s’exprime dans une mise en scène d’une sobre efficacité, aussi vivante – et servie par une direction d’acteurs soignée, attachée à faire vivre chaque personnage – que rétie à toute agitation inutile. Dans ces conditions, le tourbillon musical rossinien a toute latitude pour exercer ses charmes.

En fosse, Louis Langrée porte le spectacle avec esprit, humour, énergie – aussi enivrante que toujours au chant –, finesse, sans parler d'un merveilleux sens des couleurs. On ne peut d’ailleurs que se féliciter de la récente annonce de la prolongation de la collaboration du chef avec l’Orchestre des Champs-Elysées.

Philippe Talbot (Le Comte Ory) & Julie Fuchs (La Comtesse) © Vincent Pontet

Côté distribution, les dames nous gâtent ! La Comtesse de Julie Fuchs met la salle à ses pieds par sa présence, son charme fou et un chant d’une aisance confondante, infiniment nuancé. Elle fait un tabac à l’applaudimètre, suivie de près par Gaëlle Arquez : la mezzo met d’admirables moyens vocaux – quelle spectaculaire progression observe-t-on de la part de cette artiste ! – au service d’un Isolier plein de caractère et de jeunesse. Eve-Maud Hubeaux et Jodie Devos, respectivement Dame Ragonde et Alice, sont simplement parfaites.

Annoncé souffrant le soir de la deuxième, Philippe Talbot fait à l’évidence preuve d’une certaine prudence dans un rôle-titre particulièrement exigeant mais s’en sort fort bien et avec une irrésistible drôlerie. Bien guidé par Podalydès, il tire parti de ses travestissements sans en rajouter – l’entrée en sœur Colette vaut son pesant de pistaches ! Patrick Bolleire campe un Gouverneur de belle stature, tandis Jean-Sébastien Bou se glisse avec art dans les habits de Raimbaud.
Point d’orgue du 20e anniversaire du chœurs les Eléments, sa participation au Comte Ory montre une formation aussi bien préparée – bravo à Joël Suhubiette – qu’engagée dans une réjouissante production, pétillante d'intelligence.

Enfin, notez dès à présent sur votre agenda le Hamlet d'Ambroise Thomas que Podalydès et Langrée nous concoctent pour la fin de l'année prochaine au Comique.

Alain Cochard

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Rossini : Le Comte Ory – Opéra-Comique, 21 décembre ; prochaines représentations les 23, 25, 27, 29 & 31 décembre 2017 / www.concertclassic.com/concert/le-comte-ory
 
Photo © Vincent Pontet
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