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Le Chapeau de paille d’Italie de Nino Rota à Nantes - Un enivrant petit chef-d’œuvre - Compte-rendu

Farsa musicale indique Nino Rota pour son Cappello di paglia di Firenze, ce que Patrice Caurrier et Moshe Leiser expédient en affublant chaque personnage de nez de foire. Et basta. Car ce qui intéresse notre impeccable duo c’est d’abord la situation absurde et de plus en plus inextricable dans laquelle Fadinard est littéralement pris au piège. Ce chapeau introuvable, ce sera son – sacré - Graal, et pour nous l’occasion d’un spectacle aussi virtuose qu’intrigant.

Les metteurs en scène ont beau ne pas vouloir transposer, conserver le petit monde de la pièce de Labiche en costumes d’époque qui suffisent à signer leurs personnages surdimensionnés, l’opéra de Rota n’en laisse que plus brillamment paraître son théâtre de l’absurde, et sa grammaire dramatique quasi kafkaïenne.

On était littéralement ivre du rythme trépidant de l’ouvrage, d’autant que la distribution cousue main l’enflammait : Beau Palmer, impayable Vézinet sourdingue, Peter Kalman, Nonancourt « hénaurme »,  Claudio Otelli, Beaupertuis atrabilaire dont le monologue du III est comme décalqué de celui de Falstaff sortant de la Tamise, sans oublier l’Elena tout à fait oie blanche d’Hendrickje Van Kerkhove qui joue avec art des références belcantistes.

Mais ce n’est pas lui faire injure que de placer au-dessus cette troupe parfaite le Fadinard de Philippe Talbot,  joué avec art et avec encore plus d’art chanté. On tient là vraiment le grand ténor rossinien à venir. Et plus au-dessus encore la Baronne d’Elena Zillio qui en un geste et un mot épate la salle et surclasse ses collègues, c’est admirable de théâtre, de finesse, d’esprit, simplement de beau chant. Et cet italien à 72 printemps ! Guiseppe Grazioli, sous le charme, l’accompagnait avec tendresse, mettant ailleurs le sel de la comédie et surtout une poésie incessante qui montrait bien la complexité d’une partition dont le plaisir n’est pas le seul maître mot. Un grand bravo au chœur qui n’a pas hésité à nous montrer bien des personnages.

Jean-Charles Hoffelé

Nino Rota : Il Cappello di paglia di Firenze
Nantes, Théâtre Graslin, le 30 novembre 2012
Prochaines représentation, Angers, Grand Théâtre, les 16, 18 et 20 décembre 2012.
www.angers-nantes-opera.com

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Photo : DR
 

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