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La Forza del destino à l’Opéra Bastille – Harteros superstar ! – Compte-rendu

Cette navrante Forza del destino signée d'une main tremblante par Jean-Claude Auvray dormait dans les cartons, depuis sa création en 2011 sur la scène de l'Opéra Bastille. Hasard des programmations, cette reprise parisienne intervient quelques semaines après une spectaculaire production londonienne dont le microcosme lyrique s'est largement fait écho.
 
Difficile pour Paris de rivaliser avec le quatuor Netrebko/Kaufmann/Tézier/Pappano porté aux nues par l'ensemble de la critique. Anja Harteros par sa belle et forte présence scénique, la qualité intrinsèque de sa couleur vocale et la parfaite démonstration de son style a fait l'effet d'une oasis en plein désert. Sa Leonora douloureusement engagée, passionnément verdienne, a de tels accents, de tels élans, qu'on lui pardonne ici et là quelques problèmes d'intonation et de justesse en partie imputables à cette scénographie assassine où plus d'une voix se perd, tant le portrait de son héroïne s'avère juste et complet, et ceci juste après de mémorables représentations de Tosca qui font d'elle la diva du moment.

 Le jeune ténor américain Brian Jagde n'est pas Jonas Kaufmann, somptueux à Munich auprès d'une Harteros survoltée en 2014 (Dvd Sony), mais son Alvaro au chant clair et discipliné, plus à l'aise dans l'aigu que dans le grave, surtout dans l'air du 3ème acte « La vita è inferno all'infelice », il est vrai impossible !, laisse entrevoir de belles perspectives s'il prend soin de ne pas se spécialiser dans des rôles trop lourds.
Željko Lučić compense l'absence de mise en scène par une interprétation subtile de Don Carlo, portée par un instrument vigoureusement projeté. Sans être indigne, Varduhi Abrahamyan, superbe rossinienne, s'époumone et malmène sa ligne de chant pour venir à bout de cette Preziosilla aussi inutile que mal écrite, tandis que Rafal Siwek campe un remarquable Padre Guardiano, toutefois éclipsé par l'éclatante prestation de Gabriele Viviani en Fra Melitone.
 
Dans la fosse, Nicola Luisotti dirige la partition sans réelle enthousiasme, ni véritable implication, donnant l'étrange sensation de se reposer entièrement sur les forces de l'orchestre et de celle du chœur préparé comme toujours avec rigueur par José Luis Basso.
 
François Lesueur

Verdi : La Forza del destino – Paris, Opéra Bastille, 6 juin ; prochaines représentations les 13, 18, 22, 25, 28 juin, 2, 5 & 9 juillet // www.concertclassic.com/concert/la-force-du-destin

Photo © Julien Benhamou - Opéra national de Paris

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