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Karma dance Project - L’innocence du rêve - Compte-rendu

Il n’est pas fréquent d’assister à la naissance d’une compagnie, si petite soit-elle. Pour le Karma dance project - une Italienne, une Américaine, un Français, un Japonais -, c’est donc à une cérémonie de fonts baptismaux que l’on a pu assister à l’Espace Kiron, (une scène branchée et bien utile en son temps, mais qui connaît des problèmes techniques gênants à ce jour). Le projet est original, à coup sûr, et touchant par la confiance que les interprètes se font et mettent en leur entreprise : ne pas se donner de tête directrice, et choisir eux-mêmes leur répertoire en invitant des chorégraphes à travailler pour eux, alors qu’habituellement, c’est plutôt le contraire qui se produit.

L’affaire est risquée, et la démarche impose aux interprètes d’être des deux côtés de la barrière : on l’a vu dans cette séance qui n’était pas dépourvue de charme, tant les quatre jeunes gens qui forment ce quatuor dansant sont doués et séduisants, à commencer par l’étonnant Japonais Ikki Hoshino et la pétillante et dynamique américaine Nicola Ayoub. La pièce ambitieusement signée MTKMP (curieux comme les créateurs faibles ont besoin de se cacher derrière des enseignes obtuses) par le dénommé Marcello Raciti, barbouille les musiques les plus incongrues en un collage sans queue ni tête, et balance les danseurs les uns vers les autres sans qu’aucun projet n’en émerge vraiment, sur fond de poème qu’il eut fallu traduite (tout le monde n’est pas Shakespeare ou Goethe, et particulièrement Federica Taddei). On s’ennuie.
En revanche, avec Quadrix, éclate le talent de la petite confrérie, qui a su cette fois faire appel à un chorégraphe brillant que la France n’a pas su retenir, alors qu’il ne demandait que cela : le franco-roumain Gigi Caciuleanu, ludique, vivant, bauschien sans excès car il ajoute l’humour au style répétitif et réaliste, audacieux sans être provocant, bref un pur plaisir qui montre quatre personnalités se croisant ou se manquant. Sur l’efficace musique d’Erwann Kermorvant. Dommage que Caciuleanu n’orne plus le paysage chorégraphique français - il fut Directeur du Ballet de Nancy puis du Centre Chorégraphique de Rennes de 1974 à 1992- et tant mieux pour les Chiliens dont il dirige depuis dix ans le Ballet national. Capable d’un tel choix, le groupe montre qu’il est à suivre, à condition de prendre un peu mieux le pouls des lieux où il se produit.

Jacqueline Thuilleux

Karma dance Project – Paris, Espace Kiron, le 2 avril 2012

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Photo : © Flamingoz/Fredéric Berthe
 

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