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Iddo Bar-Shaï inaugure le 36ème Festival Chopin de Bagatelle – Paysages intimes – Compte-rendu

Depuis plus de trente-cinq ans, le Festival Chopin est fidèle au rendez-vous, grâce à l’enthousiasme d’Antoine et Ariel Paszkiewicz, respectivement président et secrétaire générale de la Société Chopin à Paris. De la fin juin au 14 juillet, l’Orangerie de Bagatelle accueille une fête de la musique de piano, celle de Chopin évidemment, mais plus largement de toute la galaxie romantique.
A chaque édition son thème, celle de 2019 n’a pas oublié que l’on célèbre le bicentenaire de la naissance de Clara Schumann, épouse de Robert certes, mais aussi compositrice et immense virtuose. Un fil rouge qui parcourt les programmes d’interprètes de toutes générations.
 
© Vincent Garnier

Choix parfait que Couperin pour commencer un récital d’abord occupé par des mazurkas de Chopin. Les affinités d'Iddo Bar-Shaï (photo) avec le maître français ne sont plus à dire (on lui doit un merveilleux récital chez Mirare) et s’illustrent une fois de plus au fil de sept pièces. Le Dodo ou l’amour au berceau : le ton est donné et les richesses du piano pleinement assumées, sans aucune nostalgie du clavecin. Dès les premières notes une porte s’ouvre ; à l’art de miniaturiste de Couperin répond celui d’un interprète apte s’il en est à saisir immédiatement le paysage intime que dévoile le morceau. On ne résiste pas plus aux inflexions des Langueurs tendres, à la lumineuse santé des Moissonneurs ou au chant entêtant du Rossignol en amour – miraculeux sous des doigts aussi inspirés.  Et que de – très humains – secrets découvre-t-on dans la Muse-Platine, l'Âme-en-peine ou les Barricades mystérieuses, vécues avec une palette de timbres infiniment variée.

« Un Couperin teinté de romantisme », disait Landowska de Frédéric Chopin ... De ce dernier, Bar-Shaï a choisi deux cahiers de quatre mazurkas, les Opus 17 et 24, situés au commencement de la production du compositeur en ce domaine. Mais quel art s’y exprime déjà, quelle capacité à concentrer un univers en quelques minutes. L’acuité de regard du pianiste, son profond sens polyphonique (écoutez-le sonder l’Opus 24 n° 4 ...) aboutissent à un résultat admirable de noblesse et de fierté. Quant aux accords sotto voce introductifs de l’Op. 17 n° 4, à eux seuls ils suffisent à dire à quel interprète des Mazurkas on a affaire ...   

Entre les deux cahiers de Chopin, les Mazurkas (en sol majeur et sol mineur) tirées des Soirée musicales op. 6 de Clara Schumann apportent comme une bouffée de fraîcheur adolescente. Rien de commun avec la dernière mazurka du programme, l’op. 63 n° 2 du Polonais. Elle émeut par sa nudité désolée et prépare à une Ballade n° 2 op. 38 que Bar-Shaï aborde avec un irréprochable sens des transitions pour mieux en souligner – en vivre – la violence intérieure. Saisissant !

En bis, une mazurka de Chopin et les Ombres errantes de Couperin achèvent d’ouvrir en beauté et en poésie le 36ème Festival. Il se poursuit avec Anne Queffélec (28/06), Gaspard Dehaene(30/06), Bruno Rigutto (2/07), David Kadouch (5/07), Florian Noack (7/07) Kotaro Fukuma (9/07), Florent Boffard (11/07), Dana Ciocarlie (13/07) et Jean-Marc Luisada (14/07). On n’oubliera pas non plus un concert découverte (en partenariat avec l’Institut Chopin de Varsovie) rassemblant les tout jeunes Piotr Alexewicz et Maciej Wota (29/06), ni le programme chambriste de John Gade, Josquin Otal et Elia Cohen-Weissert (violoncelle) (6/07).  

Alain Cochard

Paris, Orangerie de Bagatelle, 22 juin ; jusqu’au 14 juillet 2019 // www.frederic-chopin.com/pages/festival-chopin-a-paris/36e-festival-chopin

Photo © Vincent Garnier

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