Journal

Hasnaa Bennani et Le Palais Royal - Les justes couleurs de Haendel - Compte-rendu

Jean-Philippe Sarcos est un opiniâtre, qui avec son ensemble vocal et instrumental du Palais-Royal traque le concert rare. Déjà, voici trois ans, il nous avait heureusement étonnés, dans un programme dominé par la Cantate BWV 140 dite du Veilleur (Wachet auf, ruft uns die Stimme), ce témoignage majeur de la foi luthérienne du Cantor Bach. Aussi bien, quel que soit le décor sonore, il ne cesse d'être à l'écoute de l'âme. Tel aujourd'hui ce concert Haendel donné au Couvent de l'Annonciation. Un programme qui prenait la chronologie à rebours, en proposant d'abord la première partie du Messie, œuvre-emblème s'il en est, créée en 1742 à Dublin, soit six ans après la grave alerte de 1736-37, où atteint de paralysie, le compositeur était revenu miraculeusement guéri d'une cure thermale à Aix-la-Chapelle.

Dans ce volet monumental, l'approche du Palais Royal vibre d'accents œcuméniques, servie par un concert choral et instrumental inattaquable d'où se détache le soprano de l'aérienne Hasnaa Bennani qui a tout reçu en partage : le timbre, le style et le don oratoire à l'aube d'une carrière qui s'annonce plus que prometteuse (elle a chanté sous la direction de Jean-Claude Malgoire et Vincent Dumestre, entre autres, et sera très prochainement Poppée dans l'Incoronazione monteverdienne conduite par Stéphane Fuget).

Quant à la conclusion, demandée au Dixit Dominus de 1707, chef-d'œuvre d'un jeune Allemand de vingt-deux ans découvrant dans l'enthousiasme le foisonnement de l'école romaine, du lumineux archange Corelli aux deux Scarlatti père et fils et à l'évêque-compositeur Steffani (preuve de l'interaction du sacré et du profane dans la Ville Eternelle à l'âge baroque), elle s'impose pareillement par sa ferveur et son évidence, s'agissant en l'occurrence d'une des œuvres les plus difficiles du répertoire, qui exige une virtuosité sans faille des interprètes, assortie d'impressionnants contrastes expressifs et dramatiques. Contrat tenu par Jean-Philippe Sarcos et les siens avec la même intuition que dans la première partie du Messie, savoir-faire contrapuntique et jubilation mélodique à l'italienne à parts égales.

Roger Tellart

Paris - Couvent de l'Annonciation, 31 mai 2013

Site du Palais Royal : http://ensemble-palaisroyal.com

> Vous souhaitez répondre à l’auteur de cet article ?

> Lire les autres articles de Roger Tellart

Photo : DR
 

Partager par emailImprimer

Derniers articles