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Guillaume Coppola et Hervé Billaut en récital au musée Guimet (Les Pianissimes) – Quatre mains à l’espagnole – Compte-rendu

 

Depuis leur lancement en 2005, les Pianissimes ont vu passer nombre d’artistes ; elles ont aussi su en fidéliser certains et Olivier Bouley, fondateur et directeur artistique de la série, a plus d’une fois eu l’occasion de recevoir le duo formé de Guillaume Coppola et Hervé Billaut. A l’occasion de la sortie de leur nouveau et très bel enregistrement, « Rêves d’Espagne » (Eloquentia) (1) , les interprètes avaient rendez-vous à l’auditorium du musée Guimet, qui accueille la quasi-totalité de saison 2021-2022 des Pianissimes. Un lieu adapté au piano et où le public a pris ses habitudes à en juger par la salle quasi comble qui attendait les deux artistes.
 

« Rêves d’Espagne » ... Pour leur récital, Coppola et Billaut sont restés dans la thématique de leur disque, intelligemment construit, constitué pour l’essentiel d’œuvres françaises inspirées par l’Espagne (Ravel, Bonis, D’Indy, Fauré, Chabrier), avec une incursion chez Moszkowski et une autre chez un pur Espagnol (mais marqué ô combien ! par son séjour à Paris) : Manuel de Falla.
Caractère, mordant dénué de dureté : la rare Seguidilla à l’Alameda de Séville op. 73/3 de Vincent d’Indy donne fièrement le ton d’un programme plein de feu et de soleil. Le deux Danses espagnoles de la Vie brève qui suivent (transcrites par Gustave Samazeuilh) ne sonnent nullement à l’étroit dans l’espace du seul clavier tant elles mêlent énergie rythmique et sens de la couleur. On n’éprouve pas non plus de nostalgie de l’orchestre dans la Rapsodie espagnole de Ravel dont le duo sonde la poésie (remarquable Prélude à la nuit, fluide et mystérieux) et tend les rythmes avec la plus parfaite complicité.
L’intérêt du programme du disque comme du récital de Guillaume Coppola et Hervé Billaut est entre autres de réserver une belle place à des pièces aussi méconnues que réussies : après la Seguedilla de D’Indy, les pianistes offrent la charmeuse Habanera et les bondissants Gitanos de Mel Bonis, puis les Nouvelles danses espagnoles op. 65 de Moritz Moszkowski, pages toutes défendues avec un chic souriant. La soirée se referme sur des partitions plus connues : le Pas espagnol de la suite Dolly de Fauré, décidé et enjoué, et España de Chabrier dans la belle mouture à quatre mains d’André Messager. Pleine de contrastes, de timbres et d’un jubilatoire foisonnement intérieur, l’interprétation semble faire sienne le mot célèbre de celui que D’Indy surnomma « l’ange du cocasse »  : « A bas les gniou-gniou ! jamais la même teinte, de la forme, de la vie par dessus tout ! ». Un pur régal !
 
Prochain rendez-vous des Pianissimes le 21 novembre, exceptionnellement à la Scala Paris, avec Dmitry Shishkin, remarquable 2ème Prix du Concours Tchaïkovski 2019, dans un très original programme Rameau, Debussy, Medtner, Scriabine et Chopin. 
 
Alain Cochard
(1) Eloquentia ( dist. Outhere) / EL2158

Paris, Musée Guimet ( Auditorium), 11 octobre 2021 / www.pianissimes.org/paris/
 
Photo © Lyodoh Kaneko

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