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François-Xavier Roth, Tabea Zimmermann et Les Siècles à la Philharmonie de Paris – Grande fête berliozienne – Compte-rendu

François Xavier Roth (photo) et Les Siècles nous gâtent – et gâtent Berlioz ! Parallèlement à la sortie d’un très bel enregistrement (1) réunissant Harold en Italie, sous l’archet de Tabea Zimmermann, et les Nuit d’Eté dans une version un brin dépaysante – on a plus l’habitude d'une tessitures féminine dans cet ouvrage – mais très convaincante par Stéphane Degout, le chef et sa formation étaient les invités de la Philharmonie de Paris pour la soirée inaugurale de son premier « Week-end Berlioz ».

Un généreux bouquet symphonique (ouvertures de Benvenuto Cellini et de Béatrice et Bénédict, Carnaval Romain et quatre extraits de 2ème partie de Roméo et Juliette : Roméo seul, Tristesse, Bruits lointains de bal et de concert, Grande fête chez Capulet) occupe la première partie et souligne l’évidence de la relation des interprètes avec ce répertoire. Instrumentarium d’époque : dès l’ouverture de Benvenuto Cellini toutes les couleurs de l’orchestre berliozien ressortent avec une fraîcheur extraordinaire : chaque fil du tissu symphonique vit. Même bonheur avec l’ouverture de Béatrice et Bénédict, idéale de prestesse, d’esprit et précision – Roth mène l’affaire « avec la pointe d’une aiguille », pourrait-on dire en reprenant la formule de Berlioz – ou pour un Carnaval romain généreux, fluide, exempt de tout clinquant. Que de justesse de sentiment enfin dans les extraits de Roméo et Juliette, de la poésie nue, et tellement prenante, de Roméo seul  à la Grande fête de Capulet, foisonnante de détails.

Tabea Zimmermann © Marco Borggreve

La fête berliozienne ne fait toutefois que commencer puisque Roth et ses troupes retrouvent la grande Tabea Zimmermann après la pause pour un mémorable Harold en Italie. L’intériorité avec laquelle l’altiste prend la parole dans le premier mouvement met d’emblée l’auditeur en prise directe avec la substance poétique de l’ouvrage, tandis que le chef témoigne d’un raffinement inouï dans le maniement de la palette sonore. Après une magique Marche des pélerins, la Sérénade respire en grand la beauté du paysage et l’Orgie de brigands livre tout son suc avec un relief (accru par des effets de spatialisation très bienvenus) et une énergie aussi intense que maîtrisée. Elle anime mêmement l’inoxydable Marche hongroise de la Damnation de Faust que Roth offre en bis à un public conquis, avant de former le vœu d’une panthéonisation de Berlioz.

Alain Cochard

Paris, Philharmonie de Paris (Grande Salle), 11 janvier 2019
 
(1) 1 CD Harmonia Mundi HMM 902634

Photo © DR

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