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Festival Paris des orgues 2019 : trois questions à Coline Serreau et Jean-François Guipont – Richesse d’un patrimoine et fascination de la « machine-orgue »
Organisée à l’initiative des associations Le Paris des Orgues et Plein-Jeu à Saint-Séverin, Orgues en fête, première édition du Festival Paris des Orgues placé sous la double présidence d’honneur de la réalisatrice et scénariste Coline Serreau et de Xavier Darcos, ancien ministre et chancelier de l’Institut de France, propose onze rendez-vous entre le 10 mai et le 16 juin 2019. Quelques-uns des instruments les plus fameux de la capitale – qui en compte environ 200, principalement répartis entre églises, temples et synagogues – y seront à l’honneur, joués par de grands noms mais aussi par de jeunes musiciens à l’orée de leur carrière de concertistes. Coline Serreau et Jean-François Guipont (coordinateur de l’équipe de pilotage du festival) répondent à Concertclassic.
Coline Serreau © DR
Vous travaillez depuis de longs mois à la préparation de ce Festival Paris des Orgues 2019. En quoi ce festival vous semble-t-il novateur ?
Coline SERREAU et Jean-François GUIPONT : De nombreux concerts d’orgue sont régulièrement proposés au public dans les églises parisiennes. Paris possède en effet un patrimoine organistique exceptionnel, tant par le nombre de ses instruments que par leur qualité et leur diversité. Il a semblé ainsi pertinent à une petite équipe de lancer en 2017 l’idée d’une manifestation artistique d’ensemble en forme de Festival sur une période de quelques semaines, autour de l’orgue, dans l’objectif d’élargir le public habituel du concert d’orgue.
La première caractéristique de ce nouveau Festival est d’associer dans tous les concerts l’orgue à d’autres arts, à d’autres instruments. En l’occurrence, pour cette première édition, les saxophones du Quatuor Ellipsos, le hautbois de Philippe Grauvogel, les voix de Mathilde Grosjean et d’Aurélie Loilier (sopranos), mais aussi la flûte d’Anna-Picard Kelber et l’alto de Joachim Kelber, lors du concert de clôture du 16 juin, avec à l’orgue Kleuker de l’église évangélique allemande Rudolf Kelber, jusqu’en 2015 Kirchenmusikdirektor de l’illustre Hauptkirche St. Jacobi de Hambourg (qui abrite le plus grand orgue Schnitger conservé, 1693, Ahrend 1993). Un autre objectif est précisément de montrer au public la grande richesse patrimoniale du parc organistique parisien. Enfin, un troisième volet du Festival, se déroulant lui sur l’ensemble de la saison, consiste en des actions de découverte de l’orgue pour les élèves des écoles et des collèges, dans les conservatoires municipaux, à Radio France et à Saint-Eustache (photo).
À côté des « fondamentaux » de l’orgue, le Festival a voulu introduire une diversité réelle de répertoire, illustrant le caractère universel de l’orgue, répertoire qui sera mis en valeur par des instruments prestigieux ou moins connus et d’esthétiques contrastées, de Saint-Séverin à Saint-Gabriel et Saint-Éloi, de Saint-Étienne-du-Mont au temple de Pentemont. Une conférence interactive avec projection en direct sera par ailleurs proposée le mercredi 15 mai par Éric Brottier, technicien-conseil auprès du Ministère de la Culture et de la Communication : Voyage dans l’orgue de Saint-Séverin, ainsi qu’une conférence historique d’Henri de Rohan Csermak, le mercredi 5 juin à la Mairie du 6ème Arrondissement : La vie des orgues n’est pas un long fleuve tranquille… Heurs et malheurs de quelques orgues parisiens.
Jean-François Guipont © DR
L'improvisation est une caractéristique de l'art de l'organiste. Est-elle présente dans la programmation ?
C.S. et J.-F. G. : Oui, elle occupera une place importante, notamment lors de deux concerts qui lui seront entièrement consacrés : le concert d’ouverture du 10 mai à Saint-Séverin, avec la présence d’un orgue Hammond de jazz joué par Charles Balayer, accompagné du batteur Hervé Roblès ; et la « joute » d’improvisation du 14 juin à Saint-Eustache, tant à l’orgue qu’au piano, soirée présentée par Benjamin François (producteur à France Musique) – s’y affronteront quatre jeunes organistes occupant d’ores et déjà le devant de la scène : Thomas Ospital et Baptiste-Florian Marle-Ouvrard, titulaires de Saint-Eustache depuis 2015 ; Samuel Liégeon, qui fête cette année ses dix ans de titulariat à Saint-Pierre-de-Chaillot ; Karol Mossakowski, titulaire de Notre-Dame-de-la-Treille à Lille (ancien grand orgue Danion-Gonzalez du Studio 104 de Radio France, réinstallé par Philipp Klais), nouvel organiste en résidence de Radio France et de son orgue Grenzing.
L'orgue Grenzing de l'Auditorium de Radio France © Radio France / Christophe Abramowitz
Le Festival possède une composante « jeunes talents » assez importante. Quelle forme prendra-t-elle ?
C.S. et J.-F. G. : On ne sait peut-être pas assez que les classes d’orgue des conservatoires forment de nombreux jeunes organistes. Outre les artistes bien connus que sont Patrick Delabre, Laszlo Fassang, Anna Homenya, Thierry Escaich, François Espinasse, Christophe Mantoux, Yanka Hekimova, Emmanuel Hocdé, Isabelle Sebah (dans l’ordre des concerts de cette première édition), nous avons voulu donner la « parole » à un certain nombre de jeunes talents, encore en formation au CNSM de Paris (concert du 24 mai à Saint-Eustache). Une vingtaine de jeunes autres instrumentistes et chanteurs du CRR de la rue de Madrid donneront un programme Lully à Saint-Séverin le 19 mai. Au total l’effectif de nos jeunes talents présents dans le Festival se montera à la moitié de l’effectif total de nos artistes.
Pour que de nouveaux talents puissent éclore, il est essentiel de sensibiliser le jeune public et de lui donner la possibilité de découvrir la toujours fascinante « machine-orgue ». Ainsi le Festival, en collaboration étroite avec l’Inspection d’enseignement primaire de Paris, prolongera-t-il le travail de longue haleine engagé depuis 2011 par le Paris des Orgues : persuadés que « la culture peut constituer un élément fort de la réussite scolaire » (Projet de l’Académie de Paris 2017-2020), nous organiserons des concerts donnés par les enfants des écoles élémentaires dans deux églises parisiennes. Les jeunes chanteurs (une centaine), accompagnés à l’orgue, termineront leur programme par l’interprétation de l’hymne européen (Hymne à la Joie de Beethoven), chanté en français et en allemand. Quant aux collégiens, ils se verront offrir une activité de découverte de l’orgue sur trois demi-journées : conférence-découverte de l’orgue dans un conservatoire municipal, approche d’un grand orgue (Radio France, Saint-Eustache...), concert en fin d’année scolaire dans une église parisienne. À l’appui de notre projet pédagogique élargi à l’ensemble du public, on notera également qu’un cycle de conférences scientifiques, historiques et esthétiques permettra à un large auditoire d’enrichir son écoute lors de nos concerts, mais aussi de (re)découvrir la dimension totale d’un instrument qui révèle tout l’intérêt du patrimoine cultuel parisien.
Propos recueillis par Michel Roubinet
Festival Paris des Orgues
Du 10 mai au 16 juin 2019
Site Internet :
www.festivalparisdesorgues.com
Photo (orgue de Saint-Eustache) ©Mirou
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