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« Erik Satie, mémoires d'un amnésique » à Saint-Denis - Ainsi Satie - Compte-rendu

Agathe Mélinand met en scène la musique et les écrits d'Erik Satie à travers « un petit opéra comique sans lyrics » (mais avec piano), subtilement scénographié par Barbara de Limburg. Créé l'an dernier au Théâtre national de Toulouse, il y revient en cette fin d'année.
Dans ce spectacle où les mots comme les notes sont du compositeur des célèbres Gnossiennes – que l'on n'entendra pas au piano – les images surgissent parfois avec la naïveté surannée (ou vintage) attendue, parfois avec surprise.

Erik Satie apparaît d'abord dans toute son imagerie d'Épinal (quoiqu'il fût d'Arcueil). Il apparaît, c'est beaucoup dire. Six au moins peuvent prétendre jouer son rôle : les quatre acteurs (Emmanuel Daumas, Eddy Letexier, Jeanne Piponnier, Sabine Zovighian) et les deux pianistes (Raphaël Howson, Charles Lavaud). Toujours est-il que l'on porte redingote, faux-col et, surtout, parapluie. Fort heureusement, l'écueil de la biographie en costume d'époque est bien esquivé. Le fil conducteur sera plutôt ces musiques qui vraiment ne vont nulle part. Des « musiques d'ameublement » en quelque sorte. Toutes ces petites pièces, certaines bien rarement entendues telles ces Peccadilles importunes, constellent le temps du spectacle. C'est tout Satie, cela : à peine remarque-t-on leur présence que ces pages sont déjà refermées. Mais elles continuent de résonner et nous pourrions, de nous-même, nous infliger l'inlassable répétition des Vexations.
 
Sur scène, tout est aussi minimal, miniature – ou absurdement grossi, ce qui revient au même, comme ce décor « en forme de poire ». C'est beau, poétique et (d)étonnant, comme peut l'être la musique de Satie. Il y a là un petit effet « collage » qui est le seul hommage possible au musicien de Parade, d'Entracte ou de Relâche : le droit au coq-à-l'âne est bien un droit de l'art. Et même si, malgré tout, cela cependant reste un peu sage, moins sauvage, moins dada que le modèle, c'est sans doute le vrai Satie qu'Agathe Mélinand a pu approcher.
 
Jean-Guillaume Lebrun
 
Saint-Denis, Théâtre Gérard Philipe, le 24 novembre 2014.
 
Le spectacle est repris au Théâtre national de Toulouse jusqu'au 20 décembre, puis le 10 janvier au Théâtre Olympe de Gouges de Montauban.
 
Site du Théâtre national de Toulouse : http://www.tnt-cite.com

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