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​El barberillo de Lavapiés au Teatro de la Zarzuela de Madrid (Streaming) - Indémodable classique du genre - Compte-rendu

Ouvert au public comme en Espagne la plupart des théâtres, le Teatro de la Maestranza, l’Opéra de Séville, reprend en ce mois de mars El barberillo de Lavapiés. Il s’agit d’une production du Teatro de la Zarzuela de Madrid, que l’on peut retrouver en streaming (capté le 12 avril 2019), telle que nous l’avons vue. Cette zarzuela de Francisco Barbieri (1823-1894), créée avec un succès immédiat en 1874 en ce même Théâtre de la Zarzuela, n’a depuis lors plus quitté l’affiche. Un engouement du public pleinement justifié pour une œuvre inspirée, devenue parmi les plus célèbres de ce genre lyrique, même si l’on peut penser que le chef-d’œuvre de Barbieri serait plutôt à chercher du côté de Pan y toros (de 1864, sorte de Moussorgski avant l’heure teinté de bel canto).
 
Ce « petit barbier » se plante à Lavapiés, quartier populaire de Madrid (l’équivalent de Belleville ou Ménilmontant à Paris), et joue sur le nom de son compositeur comme aussi en allusion à Rossini (dont on retrouverait au passage quelques inspirations). La trame elle-même se situe au XVIIIsiècle, pour narrer une révolte populaire, dite « motín de Esquilache » (soulèvement en 1766 contre le ministre de Charles III Esquilache), entre les prétextes amoureux de deux couples croisés, deux personnages plébéiens, dont le fougueux petit barbier et meneur de la révolte, et deux aristocrates. Le tout emporté par une musique d’une belle inspiration, avec airs et duos enlevés au sein d’une orchestration fouillée et de chœurs échevelés omniprésents, souvent d’une écriture complexe (comme l’ensemble choral au début du deuxième acte).
 

© Javier del Real
 
Le mérite de cette production, signée Alfredo Sanzol, est de respecter le contexte de la pièce, avec costumes qui situent bien l’époque, populaires pour des maja et majos qu’aurait pu peindre Goya, blancs sous leurs maquillages et perruques pour les représentants de la noblesse. Malgré l’absence de décor, hors de grands et abstraits panneaux noirs coulissants. Mais le jeu et les mimiques des participants restent au plus près de leurs actions, dans leurs dialogues comme leurs interventions au sein d’une foule virevoltante (chorégraphie réglée par Antonio Ruz). Immédiatement parlant ! Et ce en dépit de surtitres uniquement en espagnol (à l’encontre des spectacles sur le vif au Teatro de la Zarzuela qui combinent des surtitres en anglais). Les passages parlés, inhérents à toute zarzuela, filent ainsi vite. Il convient cependant de passer rapidement sur le long entracte, mais qui toutefois fait place à des interviews des interprètes.
 
Le plateau vocal se révèle quasi idéal, aussi bien pour l’incarnation des personnages, les uns et les autre rivalisant de verve et de bagout, que pour leurs transmissions chantées. Dans le rôle principal, le baryton Borja Quiza dispense une émission ferme et allante en rapport avec son caractère de héros gouailleur. Sa compagne Paloma, trouve en Cristina Faus une mezzo pétulante au lyrisme sensuel. La marquise et le marquis, reviennent pour l’autre couple au timbre clair de la soprano María Miró et à la voix assurée du ténor Javier Tomé. Excellents tout autant les seconds rôles. Une fois encore, se confirme les vertus vocales des chanteurs espagnols actuels. Le chœur, celui du théâtre et au complet (nous ne sommes pas encore au temps de la pandémie), réagit d’un seul élan. L’orchestre, de la Communauté de Madrid et également titulaire du théâtre, lui aussi déployé dans son ensemble, répond sans faillir aux ordres impétueux tout autant que rigoureux de José Miguel Pérez-Sierra. À voir et à revoir, à écouter et réécouter avec délices !
 
Pierre-René Serna

Mais qu'est-ce que la zarzuela ? > Découvrez notre dossier "Une brève histoire de la zarzuela".

Barbieri : El barberillo de Lavapiés
www.youtube.com/watch?v=9K-Jfx0HNfE
 
Teatro de la Zarzuela :
teatrodelazarzuela.mcu.es/en/
 
Teatro de la Maestranza :
www.teatrodelamaestranza.es/en/
 
Photo © Javier del Real

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