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Edwin Fardini et Tanguy de Williencourt à l’Athénée – Simplicité et émotion – Compte-rendu

Alléché par les commentaires élogieux d'oreilles averties après le passage d'Edwin Fardini (photo à g.) en décembre dernier aux Invalides, on attendait avec impatience son « Lundi musical » à l’Athénée. Promesse tenue ! Et vraie révélation que la découverte de ce jeune artiste de 22 ans qui, après être passé dans la classe de Malcolm Walker au CNSMDP, poursuit sa formation dans cet établissement avec Valérie Guillorit, mais aussi Anne Le Bozec. Ajoutons-y quelques précieuses masterclasses avec Stephan Genz, Thomas Quasthoff, Bernarda Fink et Regina Werner et, dès lors, la réussite du chanteur se comprend mieux. Reste que l’exercice de la mélodie ou du lied constitue une forme de test suprême. Pas d’artifice possible – « on est à poil », aurait dit feu un grand maître.

Dès les cinq lieder de Liszt qui ouvrent la soirée (Es muss ein Wunderbares sein, Im Rhein, im schönen Strome, Vergiftet sind meine Lieder, Ein Fichtenbaum steht einsam, Über allen Gipfeln ist Ruh), les qualités d’Edwin Fardini s’imposent : richesse de la voix, longueur et homogénéité, mais surtout, par-delà la beauté de l’instrument, une clarté et un naturel de la diction, une musicalité, une présence qui le montrent continûment en prise avec la substance poétique. Pour l’aider, il peut il est vrai compter sur le jeu complice et évocateur de Tanguy de Williencourt (photo à dr). Il ne lui sera pas moins précieux dans les Quatre poèmes d’après l’Intermezzo de Heine de Guy Ropartz (auteur la traduction française), admirable cycle dont Fardini restitue avec intensité mais sans rien d’emphatique la bouleversante progression dramatique, en parfaite osmose avec un pianiste qui sait dégager les lignes de force d’une partie de clavier très touffue (l’ouvrage fut originellement écrit pour voix et orchestre).
 
Grand luxe : après la pause l’altiste Adrien La Marca vient prêter le lyrisme de son archet au duo pour les Deux Gesänge op. 91 de Brahms. Poésie quintessenciée : Fardini touche à une forme d’idéal. 22 ans seulement ... : on se refera la réflexion au terme des Kindertotenlieder de Mahler dont le baryton-basse saisit la beauté douloureuse et secrète avec une clouante alliance de simplicité et d’émotion. Une soirée magique ; un chanteur dont vous entendrez bientôt reparler.
Le dernier des « Lundis musicaux » de la saison aussi, série excellemment dirigée par Alphonse Cemin qui aura démontré un fois de plus combien elle est précieuse pour les chanteurs de la nouvelle génération.
 
Alain Cochard

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Paris, Athénée Théâtre Louis-Jouvet, 14 mai 2018.

Photo © DR

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